Mise en avant

Comprendre la nouvelle économie post-capitaliste

Une économie post-carbone implique-t-elle la disparition de l’argent et du capitalisme? La nouvelle économie décarbonée inverse le rapport entre production de richesse marchande et production de richesse humaine : basée sur les échanges d’informations et de services, elle annonce l’ère d’un capitalisme décentralisé et redistribué.

Depuis la dérégulation des marchés financiers dans les années 80, la monnaie a tendance à ne plus refléter l’économie réelle. A l’échelle planétaire, les PIB ont continué à augmenter de façon régulière, alors que les inégalités se sont pourtant creusées. Quant à la courbe de l’emploi, elle n’a pas suivi l’évolution qu’elle aurait logiquement dû suivre, puisque l’emploi a proportionnellement baissé.

La « richesse » créée est  donc de plus en plus immatérielle et se concentre entre les mains d’une minorité. L’argent ne veut plus rien dire, il est créé virtuellement et n’est pas toujours le fruit d’une activité économique. La crise de Lehman brothers nous a prouvé qu’il était devenu  toxique.

Le capitalisme tel qu’on nous l’a enseigné -basé sur la gestion de la rareté- est amené à spéculer de plus en plus sur ce qui est rare… comme les ressources, les terres fertiles…  C’est pour cela que notre système financier actuel est au coeur du problème du réchauffement climatique, de la déforestation de la perte de biodiversité, des pénuries alimentaires, de l’explosion démographique. Il impose un modèle incompatible avec nos écosystèmes naturels vu qu’il repose sur une croissance exponentielle et linéaire de la dette financière et de la production de « richesses » .  La finance et la monnaie se sont attelées à répondre à un système d’économie de l’extraction et du toujours plus !

  • Intégrer le risque carbone dans la finance

D’un côté il est nécessaire de « décarboner l’économie » en faisant une finance responsable et en décarbonant les portefeuilles, intégrer le risque carbone dans les modèles d’investissement

http://www.novethic.fr/empreinte-terre/climat/isr-rse/finance-et-climat-assurer-une-transition-ordonnee-vers-une-economie-decarbonee-143327.html

  • Le modèle capitaliste financier et monétaire crée une dette écologique

D’un autre côté, on peut donc considérer que les dettes financières des états sont intimement liés à la dette écologique : les pays du nord -qui financent leur économie  grâce à leur dette- ont en réalité une dette écologique envers les pays du sud ( d’où la nécessité de décentraliser la monnaie , sans l’intermédiation des Etats)

voici un article qui l’explique très bien

et encore un autre

  • La dette publique est un faux problème

Ainsi, une partie de la population paye des impôts pour rembourser les intérêts à une autre partie de la population. (ce qui est absurde ! Elle produit, travaille et pollue donc pour rien ? )

Or, selon Thomas Piketty, en réalité « la dette publique est un faux problème parce que les patrimoines financiers, immobiliers et marchands possédés par les ménages ont progressé beaucoup plus fortement que n’a progressé la dette publique. Cette augmentation des produits marchands est beaucoup plus importante que la dette publique qu’on pourrait annuler. (…) En revanche, si on augmente de 2°C la température de la planète d’ici cinquante ans, ce n’est plus un jeu d’écriture ! Et on n’a rien sous la main permettant de régler le problème de ce coût imposé au capital naturel. (…) Le PIB n’a pas de sens: Il faut prendre en compte ce qu’on a détruit, comptabiliser le capital naturel. Rendre compte de ce qu’on crée sans déduire ce qu’on a détruit est stupide ». http://www.reporterre.net/La-dette-publique-est-une-blague-La-vraie-dette-est-celle-du-capital-naturel

  • L’échange , peu importe la monnaie…

Le PIB évoque un vieux modèle linéaire : extraire, produire, consommer, jeter d’une façon illimitée.

La nouvelle  économie inverse le rapport entre production de richesse marchande et production de richesse humaine. Il faut inventer une économie toujours basée sur les échanges d’informations et de services car c’est grâce à cela que nous prospérons (à l’image d’un écosystème) (économie circulaire du bien commun, économie du partage, etc ) sans passer par l’intermédiation de pouvoirs centraux qui utilisent la monnaie comme un outil de pouvoir et de spéculation ( augmentation ou baisse des taux d’intérêts, polit!que du dollar faible etc etc)

  • Optimiser, partager, faire circuler

Grâce à cette nouvelle vision, on crée une économie basée sur une optimisation de ce que l’on a déjà et on crée de la valeur sur les échanges ( on passe du fait de posséder une voiture au partage de la voiture )

c’est pour cela que de nouvelles monnaies émergent :

Il y a celles qui relocalisent :

  • les monnaies locales

http://www.reporterre.net/Avec-les-monnaies-locales-une

  • Celles qui suppriment l’intermédiation de la monnaie et se base sur l’échange
  • la banque du temps réelle ou virtuelle , exemple de l’application Indigo , une appli qui permet de tout échanger sans le moindre euro

http://www.wedemain.fr/Indigo-une-appli-pour-tout-echanger-sans-le-moindre-euro_a1118.html

Une nouvelle « monnaie d’échange » émerge de plus en plus donc c’est l’humain, le temps et la confiance (une mauvaise note sur airbnb compromet la suite de l’utilisation du service)

Le bitcoin et l’ether réinventent la monnaie et la finance du monde d’hier puisqu’il en changent les règles. : une économie post-capitaliste, décentralisée , avec des capitaux redistribués, qui circulent entre les mains de tous, la stimulation d’une économie collaborative, diversificatrice , et peer to peer.

  • Vers la fin du capitalisme financier : les crypto-monnaies qui suppriment l’intermédiation des états et décentralisent

Pourquoi cela décarbone ? Tout d’abord car cela règle les causes évoquées plus haut. Une économie est exsangue et toxique si les flux ne circulent pas. Or ces nouvelles monnaies stimulent l’échange de pair à pair.

Les crypto-monnaiens accompagnent à travers leur technologie la mise en place de l’économie collaborative du monde de demain ( donc décarbonée)

En effet, Le bitcoin et l’ether réinventent la monnaie et la finance du monde d’hier puisqu’il en changent les règles. : une économie post-capitaliste, décentralisée , avec des capitaux redistribués, qui circulent entre les mains de tous, la stimulation d’une économie collaborative, diversificatrice , et peer to peer.

Le bitcoin ne dépend ni d’un Etat ni d’une banque centrale. Il nait de la cryptographie mathématique. Ce n’est pas fictif c’est bel et bien et réel : les bitcoins sont d’ailleurs transformables en euros. C’est une révolution, car elle annonce une économie peer to peer.

http://rue89.nouvelobs.com/2015/06/27/grece-bitcoin-successeur-leuro-259961

pour le comprendre : http://www.les-ernest.fr/le-bitcoin-quand-la-cryptographie-reinvente-la-monnaie-2/

On peut aller comprendre qui sont ses utilisateurs à Paris 35 rue du caire

http://www.20minutes.fr/paris/1356049-bitcoin-paris-aussi-se-laisse-gagner-par-la-monnaie-virtuelle

Comment surveiller le bitcoin ?

Blockchain est le carnet de comptes du bitcoin. Dans la blockchain il y a toutes les informations et les transations qui ont eu lieu depuis la création du bitcoin.

Pour comprende

https://www.futuribles.com/fr/base/document/les-monnaies-virtuelles-au-dela-du-bitcoin-quelles/

L’éthereum, un modèle qui va plus loin que le bitcoin

il s’agit ni plus ni moins d’utiliser cette technologie algorithmique pour l’étendre à toute sorte d’applications et de services: rédaction de contrats numériques, vote électronique, covoiturage, réservations d’hôtel… Le tout dans un écosystème décentralisé qui ne dépend pas de la compétence d’une autorité centrale, d’un gouvernement ou d’une entreprise.

Extrait de l’article et des propos de Stephan Tual :

http://www.letemps.ch/Page/Uuid/33f349a6-5b89-11e4-b7f4-d2d5f283df81/Stephan_Tual_Ethereum_cest_le_Web_sans_les_serveurs

« Ethereum, c’est le Web sans les serveurs web. Plus spécifiquement, c’est un langage de programmation, une plateforme sur laquelle la communauté est invitée à développer des applicatifs et des services distribués sur un réseau impossible à corrompre et à pirater, car sa sécurité est garantie par des protocoles cryptographiques. En d’autres termes, il s’agit d’appliquer la technologie du bitcoin au-delà d’un usage strictement monétaire.

« Ethereum vise à bâtir un Web où les intermédiaires entre les clients et les services qu’ils recherchent n’existent plus. Si je veux, par exemple, conclure un contrat numérique avec vous, pourquoi est-ce que j’aurais besoin d’un avocat pour cela? Mettons-nous d’accord sur les modalités de ce contrat. Dans l’infrastructure d’Ethereum, celui-ci n’est pas modifiable ou falsifiable puisque sa sécurité est garantie par un protocole cryptographique. On s’économise des frais d’avocat tout en gagnant en sécurité. Cette idée peut s’appliquer à d’autres services comme les réseaux sociaux, les sites de financement participatif (Kickstarter ou Wemakeit), eBay, Airbnb… Nous résolvons plusieurs problèmes actuels au Web ».

« En Allemagne, plusieurs entreprises actives dans les smart grids sont séduites par les potentialités offertes par Ethereum. Dans d’autres secteurs aussi. IBM, par exemple, utilise notre code pour développer son programme Adept qu’elle utilise pour ses recherches sur l’Internet des objets. Ethereum est une plateforme open source. C’est donc idéal si des grands groupes utilisent notre technologie ».

 

Valérie Zoydo (avec toutes les sources citées plus haut 😉  )

 

Mise en avant

Journal intime d’une freelifeuse néonomade, Chap. 1

 

Crédit Enrico Barazzoni

 

Journaliste free lance, j’ai choisi depuis 6 ans d’être viscéralement moi-même et de libérer mes identités multiples. Je me débrouille pour vivre librement, au rythme de la sérendipidité, de la simplicité volontaire et de l’aventure d’être soi.  Je suis ce qu’on appelle une freelifeuse.   (Version originale de l’article paru dans le numéro 7 de We Demain)

 

« L’homme est une marionnette dont les aléas de l’existence tirent les fils », disait le maître indien Swâmi Prajnânpa. La seule liberté est peut-être celle de laisser l’existence décider et de savoir jouer avec elle. 6 septembre 2013, mes dix cartons tiennent dans la Kangoo garée dans le hall de la rue Bergère, dans le 9ème. A force de déménager, je n‘ai plus grand chose. C’est la voiture d’un ami du tango, Frédéric, permaculteur. Il a accepté de m’amener jusqu’à Barcelone. J’avais quitté cette ville l’année d’avant pour devenir conseillère de Corinne Lepage. Une rencontre improvisée avec l’ancienne Ministre de l’environnement à Avignon fin juillet 2012 avait débouché sur une proposition de collaboration. Ma revue REZOmag dont la baseline s’intitulait « le sens est ailleurs » cofondée à Barcelone en 2010 battant de l’aile, je la mettais donc entre parenthèses avec l’espoir de pouvoir contribuer à changer le monde à ma manière. Dix mois plus tard, mon solde de tout compte récupéré dans les locaux du parlement européen à Paris boulevard Saint-Germain , je renoue avec mes identités multiples : une journaliste néonomade, créative culturelle et « danseuse diurne de la vie ». Je ne peux alors plus payer ma location, trop chère pour ma vie lente de freelifeuse. Je décide de vivre à nouveau entre les deux villes avec un loyer à moindre coût à Barcelone, et une location à la nuit dans mon ancien appartement à Paris : mes anciens colocs acceptent que j’alterne entre le canapé et leur chambre quand ils ne sont pas là. Quant à mon futur colocataire barcelonais, je l’ai juste vu sur Skype lorsqu’il m’a fait visiter l’appartement avec la caméra de son I-phone. Après 11h de voyage, un emménagement express, quelques bières et une escalivada -du pain avec des poivrons, de l’oignon, finement préparés avec des sardines volées dans le restaurant dans lequel il travaille auprès d’un chef étoilé- mon nouveau colocataire finit par m’avouer, un peu éméché qu’il n’est autre qu’un ancien trafiquant de drogue international. Son portable a été pris en filature lorsqu’il allait chercher sa marchandise à Ceuta, au détroit de Gibraltar, avant de l’envoyer au reste de l’Europe. Il risque 14 ans de prison. Je lui annonce mon départ moins de 24heures plus tard et j’atterris avec mes cartons en catastrophe chez un ami, Guillaume, dans un somptueux duplex au dernier étage d’un immeuble avec terrasse exposée au soleil toute la journée. Je dois y rester une semaine. J’y suis toujours entre deux voyages à Paris.

crédit Enrico Barazzoni

A bord du train de vie d’une freelifeuse, les lieux, les opportunités, les rencontres défilent au gré du hasard. A travers les fenêtres « jour », « semaine », « mois », « année » du calendrier de mon Mac Book Air, j’effectue du regard des va et viens. « Lun.23 septembre 2013, 17 :00 RDV Etienne Klein, Objet : physique quantique, café Le Rostand, jardin du Luxembourg/19 :00 méditation/ Jeu.26 septembre 2013 départ Orly Ouest, réserver taxi partagé Wecab. /Semaine 7 octobre, 2013 montage Paris reportage TV maison flottante, autosuffisante, mobile. / Mar.22 octobre, Pecha Kucha du Global Eco Forum de Barcelone./ 8-9-10 novembre 2013, Tango Marathon Paris/ Mer.13 novembre 2013, Dîner conspirateurs positifs, Institut des futurs souhaitables. / Mar.19 novembre 2013, conférence Ben Flanner, fermes agricoles toits de Brooklyn, Institut d’Architecture avancée de Catalogne». Pas une journée ne ressemble à une autre mais certaines sont plus représentatives que d’autres d’une vie menée au rythme de la sérendipité.

Barcelone, mercredi 4 décembre 2013, je sors de mon immeuble, carrer Bailen, pas très loin du passeig San Joan et de la Sagrada Familia. La lumière frontale me contraint à enfiler mes lunettes de soleil malgré le solstice d’hiver qui approche. Elle redore les parois des immeubles modernistes catalans, et finit sa course sur les dalles des larges trottoirs du quartier de l’Exaimple au milieu des ombres des quidams qui déambulent avec nonchalance. Je me dirige vers le très bobo quartier de Gracia pour voguer d’un café à l’autre à la merci des connections Wifi. Mon ordinateur portable sous le bras, j’alterne entre le Godot, carrer (rue) Sant Domènec, l’auberge de jeunesse Generator, carrer Corsega, et mon restaurant Slow food, carrer Venus où je déjeune presque chaque jour vers 15h00 pour un menu à 10 euros, chez ma nouvelle amie Cécile. Cette ex-parisienne travaillait dans le milieu de la production de pub pour des marques de luxe. Elle a monté son restaurant « D’aquì », (d’ici en catalan), et ne se fournit qu’auprès de coopératives de producteurs bios catalans. « Il est loin le temps où je courais les ventes de presse à Paris pour remplir mon placard de fringues branchées », s’amuse Cécile avec un fichu sur la tête. J’acquiesce. Elle me parle d’André Broessel, l’associé allemand de son compagnon, qui vient d’inventer les sphères solaires. Depuis son atelier du quartier populaire de Poble sec, ce savant fou a repris le concept de l’effet loupe en observant par hasard les billes de sa fille, pour optimiser la captation de l’énergie du soleil à travers la transparence de la sphère et sa forme incurvée. Le lendemain matin, après avoir avalé un capuccino au Primavera café, à 1,40 euro où je peux lire la 4ème de couverture de la Vanguardia –elle recèle souvent de portraits d’acteurs du changement- je pars rendre visite à l’homme aux lunettes de soleil à verres jaunes, d’après la vidéo futuriste prévue pour la campagne de crowdfunding. Sa fameuse invention, apparemment plus efficace qu’un simple panneau solaire, a récemment attiré l’attention des architectes du gratte ciel Burj Khalifa de Dubaï qui l’ont invité à présenter son projet. La campagne de financement participatif vient d’ailleurs de rafler 217 000 dollars.

 

Clandestine, comme les petits bonheurs volés auxquels elle invite


Le soir venu, après quelques interviews sur skype, je vais à une milonga (bal) de tango. Clandestine, comme les petits bonheurs volés auxquels elle invite, toujours dans le quartier de Gracia, dans un immeuble délabré Carrer Mare de Deu dels Desemparats. Au deuxième étage, derrière l’épais rideau bleu de la porte d’entrée, une vingtaine de personnes s’y retrouvent le mercredi et le vendredi soir. Tous les profils s’y mélangent : un pompier, une prof de maths, une graphiste, un champion de poker, un réparateur de machines à laver le linge, un comédien, un peintre, un guide touristique, une avocate, une ostéopathe. Les âmes libres et parfois esseulées viennent chercher un peu de réconfort dans la chaleur d’un abrazo cerrado (bras fermés). Cette promenade de danseurs enlacés, dont les pas félins s’entremêlent avec la précision de l’aiguille d’une machine à coudre, est un repère de freelifers. S’il n’y a pas un modèle type, car par définition le freelifer explore ses affinités multiples, il ne sait faire autre chose qu’être viscéralement lui-même. Et c’est souvent en se libérant du diktat de l’argent et d’une vie rythmée par des obligations et de fausses croyances, que tout devient possible. Avoir le courage d’être soi, être en accord avec ses valeurs, devient alors presque maladif chez lui. Persévérer dans son être, se mue en maudite chance. Car ce choix ne veut pas dire qu’il vogue sur un fleuve tranquille, non, il apprend juste à danser avec le chaos, « Faut-il que l’on s’aime et qu’on aime la vie ».

Crédit Paco Sanz

Celui qui m’a fait entrer dans le tango, il y a trois ans, c’est Marc. Rencontré par hasard dans une boite de nuit au dernier étage de l’hôtel Me à Barcelone, il a été un vrai passeur de liens, voire un fixeur dans ce monde de demain. Ce bourgeois catalan repenti, se partage entre son palais gothique en ruines à Cardona, (vers Montserrat en Catalogne), et surfe d’un canapé à un autre à Barcelone. Il loge dans son palais gratuitement des amis en échange de services rendus. Il m’a présenté Alex Capdevila qui est parti en Pologne pour construire ses maisons flottantes autosuffisantes sur l’Oder à Wroclaw ; son vieil ami d’enfance Fernando Casado qui a créé Global CAD, le Centre d’Alliance et de Développement, basé entre Barcelone et Washington, spécialiste de la base de la pyramide (les populations pauvres). Ce dernier organisait chaque mois dans son appartement des projections de documentaires militants. J’y ai rencontré bon nombre d’artistes, et de fil en aiguille je suis tombée sur Ana Martinez, coordinatrice des laboratoires de l’autosuffisance à Valldaura, dans les collines de Collserola, avec qui nous allons monter un Do Tank axé sur l’empowerment citoyen.

Nous sommes toujours à la milonga de tango « El desbande ». Entre deux danses, on papotte souvent accoudé au bar, encore bercé par la chorégraphie improvisée du dernier tango. « Vous êtres française ? » me demande une femme fine. « Oui, pourquoi ? » ; « J’adore la France, vous faites quoi dans la vie ? », « Je suis journaliste free lance entre Paris et Barcelone, je m’intéresse aux changements de société, tout ce qui porte le stigmate d’une (r)évolution ou d’une transition vers le monde de demain, quelque soit le domaine. Ca peut aller de l’agriculture, à l’énergie, en passant par l’économie, les nouvelles technologies ou la e-democratie. J’utilise Barcelone comme mon laboratoire », je lui réponds. « Vous devez connaître le Parti X alors ? », me demande-t-elle. « Oui, le parti des indignés ! Bien sûr, je m’y intéresse depuis sa création, mais vu qu’ils souhaitent fonctionner avec l’anonymat, ça fait un an que j’en cherche le fondateur ». « C’est moi », me répond Simona Levi. « Alors ça c’est incroyable, c’est le destin ! », je m’exclame. « C’est vrai que nous essayons de couper court avec les anciennes logiques politiques basée sur l’ego. », me répond-elle. Je me souviens encore de mes tentatives vaines pour les rencontrer, intéressée par leurs nouvelles techniques de démocratie directe, de pouvoir latéral, et de financement participatif. J’avais même proposé à Corinne Lepage qu’elle s’inspire d’eux pour son mouvement citoyen. Composés de membre de la société civile, ils réinventent la politique en se basant sur les travaux issus des assemblées de la génération du mouvement 15 M (né à la puerta del sol à Madrid le 15 mai 2011). Un reportage est prévu pour la suivre en déplacement pour les élections européennes. Voulant fonctionner avec le minimum d’argent on me propose d’y aller en covoiturage et de dormir chez des membres du parti. Je pars avec un photojournaliste italien, rencontré à un happening de théâtre, il vit sur un bateau dans le port de Barcelone.

De retour à Paris, j’expose mes aventures à l’équipe de We demain, autour d’un déjeuner à la pizzeria de l’avenue Victor Cresson à Issy les Moulineaux. « Mmmmm, douteux ton truc Zoydo, en quoi les sphères solaires sont l’invention du siècle ? », me demande circonspect François Siegel, notre directeur de publication. « Le dispositif a un tracking system, c’est à dire un bras avec une lentille intégrée qui suit le mouvement du soleil toute la journée et capte ainsi l’énergie en permanence. Un simple panneau solaire ne capte les meilleurs rayons du soleil que 15 minutes par jour selon l’inventeur puisqu’il est fixe! », je réponds, fatiguée de devoir me battre pour vendre mes sujets. « Et le parti X, la politique de demain, ça ne vous intéresse pas ? », j’insiste. « T’es trop enthousiaste Zygotto, tu vis trop le changement à l’échelle personnelle, essaye de prendre du recul ! », me répond Jean-Louis Morzatti, notre rédacteur en chef.

11 février 2014, 20h30, 17 Rue de Montyon, dans le 9 ème arrondissement, une soirée privée est donnée au Floquifil, une cave à vin et table d’hôtes hors du temps, au décor digne d’un roman de Maupassant : cheminée, pierres apparentes, bois, mobilier déniché dans des brocantes, vieilles lampes, fauteuils clubs en cuir. Pour fêter le premier anniversaire de son restaurant, Philippe Pourriel personnage haut en couleurs, mi-aristocrate, mi-révolutionnaire affublé d’un couvre-chef de flibustier a convié ses clients les plus fidèles. Le thème de la soirée : chapeau. C’est ici, lorsque je suis à Paris, que j’écris parfois mes articles et je déjeune ou dîne avec des acteurs du changement, allant du tribunal de la nature, de la finance éthique jusqu’à la e-democracy.

Coiffée du Borsalino de feu mon grand-père, je n’ai rien changé à mon accoutrement de libertaire. La première fois que je l’ai porté il y a 6 ans, je m’évadais de l’univers aseptisé et carcéral d’une tour de la Défense où je travaillais comme petit soldat du journalisme pour un quotidien gratuit lancé par un grand industriel français. Quelques jours après ma démission, je brandissais mon chapeau sur la tête comme la revendication d’une différence, et le début d’une odyssée : « Deviens qui tu es ». J’entamais alors un processus de révolution d’être soi, en quête de mes valeurs et de ma créativité. Je ne voulais plus perdre ma vie à la gagner, mais bel et bien lui donner du sens. Après une tentative infructueuse de collaboration dans un site web d’informations en flux continu, où la dictature de l’immédiateté menaçait ma liberté naissante, je décidais de partir à Barcelone pour trois mois. Au programme, un trimestre de formation au reportage Télé à l’université Pompeu Fabra pour renouer avec le terrain, des rêves et des choses à dire plein mes valises et un accès illimité à une école de danse. Flamenco, Jazz, danse classique, danse contemporaine, hip hop, tout y est passé, il fallait bien que le corps exulte. J’ai surtout appris à insuffler dans ma vie du lâcher prise. Et lorsque j’ai goûté à la sensation grisante d’être passé de l’autre côté du miroir, il n’y avait plus de retour en arrière possible. J’acceptais alors en toute liberté de me soumettre aux seules lois de l’existence. Les trois mois se sont prolongés en années, pendant lesquels j’ai répondu aux opportunités qui s’offraient à moi, et oscillé d’un rôle à un autre comme dans une valse à mille temps : je passais de l’écriture d’un projet personnel d’émission de télé pour TVE (Télévision espagnole) sur les héros écolos du quotidien, à un petit job de vendeuse à la sauvette sur la plage de la Barceloneta et les ramblas, de réalisatrice d’un documentaire de 15 minutes sur les contaminants toxiques persistants de l’industrie agro-alimentaire et chimique pour un concours de la fondation de la biodiversité à serveuse de diner sur des yatchs dans le port de Barcelone.

Les événements s’enchainent comme dans un roman. Ils viennent à moi, comme un coup de baguette magique quand j’en ai besoin. Ma première année à Barcelone a ainsi été ponctuée de projets créatifs et de système D pour accompagner le bon déroulement de ces derniers : billetterie dans une soirée underground de Poblenou, vendeuse d’un jour au magasin « Sacrés Français » de mes amis Christophe et Guillaume, prof de Français, assistante du professeur de tango, rien ne me lassait car tout était fugace, mais opportun. Mon travail de rédactrice en chef du magazine local des Français de Barcelone payé 500 euros le mois au noir a finalement débouché à la co-création de mon magazine REZO lorsque le directeur de publication nous a tous virés du jour au lendemain. Né de la résilience, le premier numéro voit le jour sous le titre « Le monde change n’ayez pas peur ! ». Pendant un an et demi, ce magazine, fonctionne en grande partie grâce au troc. D’ailleurs, l’échange de services rythme toujours mon quotidien, comme par exemple, donner des cours de français pour recevoir des cours de tango, ou défiler pour une marque locale d’écharpe en laine tricotée à la main « True nature », contre un processus de coaching personnalisé.

 

Crédit Enrico Barazzoni

Aujourd’hui encore, j’apprends à danser avec la vie dans un corps à corps sensuel où je me laisse guider par ses imprévus, son langage. J’accompagne ses mouvements, qu’ils soient harmonieux ou dissonants. Tout devient nourriture. Poésie. D’ailleurs, en langage des oiseaux, la magie signifie « l’âme agit ». C’est ainsi qu’en janvier 2012 j’ai trouvé mon appartement, aux urgences d’un hôpital. Après avoir surfé d’un canapé à l’autre chez des copains, j’avais atterri dans une chambre de service à 175 euros, dans les quartiers chics de Sarria, chez des footballers argentins à la retraite recommandés par Andrés, mon ami architecte. La légende dit que Maradona avait occupé cet appartement. J’ai foncé. Le lit de camp aux allures d’hôpital de guerre a eu raison de mon dos et j’ai atterri aux urgences, totalement bloquée. En larmes devant le médecin urgentiste désemparé, il m’a proposé : « ça vous dit une super machine à café, un dressing juste pour vous et un lit king size pour 200 euros ? ». Entre deux ordonnances, il me glissait son numéro de téléphone et son adresse. « Carrer Pallars 158, 08005 Barcelona », dans les anciens quartiers industriels de Poblenou, à dix minutes à pied de la plage. J’emménageais deux jours plus tard.

Il est 22heures au Floquifil, à Paris. Je suis accompagnée de ma colocataire italienne chirurgienne des viscères, Silvia. Deux coupes de champagnes, un verre de côte de Brouilly, deux verrines de tartare de saumon à la mangue, et quelques tranches de Jamon iberico de bellota plus tard (accès au buffet et à la cave à volonté pour 15 euros, le freelifer est le roi du bon plan), j’entends s’échapper d’une conversation le mot « Barcelone ». « Vous habitez à Barcelone ? », je demande au jeune homme en pleine conversation. « Non, je vais juste au World Mobile Congress pendant une semaine » « Ah oui c’est vrai, j’avais oublié, je voulais m’accréditer », « Pas la peine, je vous invite, donnez-moi votre mail », me propose cet employé généreux de chez Orange. Deux semaines plus tard, me voilà faisant la queue dans la titanesque Fira de Barcelone pour attendre la venue de Mark Zuckerberg, prévue à 18h. Nous sommes une bonne centaine, là, à patienter depuis 16 heures. J’appelle François Siegel pour lui proposer un sujet : « On ne sera plus dans l’actu, c’est pas la peine, en revanche dépêche toi de nous rendre ton papier de free lifeuse », me répond-il. Tant pis, j’y suis. Dans la queue, je m’amuse à regarder les prénoms des badges : Kok, Filomena, Deepak, Pablo, Takashi, Bernard, Nikos, Camileo, Tom, Tannas, c’est cette mixité que je suis venue chercher à Barcelone. La « rock star » -en jean basket de 29 ans-, presque « président » d’un 6ème continent finira par arriver. A la question posée par le journaliste Bruno Sokolowicz de la Radio Nationale Espagnole « Comment voyez-vous Facebook dans 20 ans et que comptez-vous faire pour rendre le monde meilleur? », Mark Zuckerberg a juste répondu: « Vous ne croyez pas que j’en fais déjà assez?! » C’était une des phrases de fin de la conférence avant qu’il ne reparte aussi vite qu’il est arrivé, le sourire aux lèvres, les joues rosées et l’air timide, en se dérobant derrière le décor, comme un génie qui retourne dans sa lampe. Pas un mot sur l’environnement. Pour rendre le monde meilleur, il faut simplement être soi. Je fais partie de ceux qui, aussi petits soient-ils, souhaitent incarner le changement qu’ils veulent voir dans le monde. Et y croient. Mon défi, c’est d’être le plus libre possible pour vivre selon mes valeurs, mes biorythmes et surtout partager du temps avec les autres, car là est la grande valeur du monde de demain. Donner du sens à ce que l’on fait, à nos relations avec les autres. Et à la vie.

 

Valérie Zoydo

Mise en avant

André Broessel : «Je voulais optimiser la captation de la lumière»

(Article paru dans la lettre de l’écolonomie http://www.pocheco.com/je-ne-suis-rien-mais-avec-ce-rien-je-bousculerai-le-monde-entier)

André Broessel, architecte natif allemand, vit à Barcelone. Il vient d’inventer Rawlemon, des sphères solaires capables de générer de l’énergie. Depuis son atelier du quartier populaire de Poble sec, il a repris le concept de l’effet loupe et a pour but de produire une énergie propre avec une faible empreinte carbone. Interview.

La sphère solaire sur un toit de Barcelone

La lettre de l’écolonomie : Comment vous est venue l’idée de Rawlemon et en quoi consiste-t-elle ?

André Broessel : Il y a trois ans, c’est en observant par hasard les billes de ma fille  que j’ai eu l’idée d’utiliser, des sphères transparentes pour produire de l’énergie d’où notre slogan « The future is not green, it’s transparent ! » (Le futur n’est pas vert, il est transparent). Pour un physicien, la sphère est un peu un taboue car il s’agit de la géométrie la plus parfaite. Etonnamment, elle a été un peu oubliée. En ce qui me concerne, je voulais reproduire le fameux effet loupe, c’est à dire faire converger en un point focal les rayons du soleil et créer une concentration de ces rayons lumineux sur une cellule photovoltaïque. Je me suis dit que ce procédé ne pouvait qu’optimiser la captation de l’énergie solaire et pourquoi pas transformer une énergie diluée (même de faible intensité par temps nuageux ou la lumière de la lune) en énergie concentrée. En passant de la géométrie plane d’un panneau photovoltaïque à une géométrie en trois dimensions de la sphère, ce procédé pourrait en effet étendre la  production d’énergie solaire à l’ensemble de la planète, avec différents usages. Il existe ainsi la possibilité d’installer des petites sphères de 5 centimètres les unes à côté des autres, (à l’image d’un jeu de boules) sur les façades des immeubles. Ce procédé permet de rendre un édifice autosuffisant en énergie tout en laissant passer la lumière. Une sphère allant d’1m à 1m80 de diamètre peut également être installée sur le toit des immeubles. D’ailleurs, plus la sphère est grosse plus elle produit de l’énergie : une sphère de 1m80 peut ainsi recharger une voiture électrique. Mais il existe aussi le chargeur individuel de portable ou de tablettes avec une sphère de 10 et 20cm de diamètre.

André Broessel

Avec Rawlemon, vous avez donc la possibilité de capter la lumière diffuse tout au long de la journée. Concrètement, comment ça marche ?

Les sphères transparentes collectent les rayons lumineux qui convergent sur un collecteur. Ce dernier capte l’énergie en permanence grâce à un système appelé « dual axis tracking system ». En effet, ce collecteur est positionné sur un bras métallique incurvé, fixé sur les deux pôles de la sphère. Pour suivre le mouvement du soleil, le collecteur se déplace verticalement le long de cet arc. Lui-même exerce un mouvement horizontal circulaire autour de la sphère pour suivre la course du soleil. Les cellules photovoltaïques et de mini-générateurs de chaleur convertissent ensuite l’énergie en électricité et en énergie thermique. La concentration de la lumière sur ce principe fonctionne si bien que les sphères Rawlemon opèrent non seulement au  soleil, mais même lorsque le ciel est couvert, ou pendant la nuit : elles recueillent cette lumière et peuvent la transformer en énergie.

Votre invention s’avèrerait donc bien plus efficace qu’un simple panneau solaire. Pouvez-vous nous expliquer plus précisément pourquoi et sur quelles études et données chiffrées vous-êtes vous basés ?

En effet, la production de l’énergie s’effectue à travers cette cellule photovoltaïque dont le rendement est exponentiel, il pourrait aller jusqu’à 100 fois par rapport à un panneau photovoltaïque de la même taille.

L’explication est en réalité simple : un panneau solaire conventionnel ne capte les meilleurs rayons du soleil que 15 minutes par jour car il est fixe ! Or, la sphère est une surface parfaite puisqu’elle est traversée par les rayons de lumière quelque soit le moment de la journée à l’image d’un œil ou du globe terrestre. C’est ainsi que le dual axis tracking system capte l’énergie en permanence, même la lumière de la lune. Sur un toit d’immeuble ou sur une façade en position verticale, le système a donc un bien meilleur rendement qu’un système photovoltaïque traditionnel.  En ce qui concerne les études prouvant l’efficacité du produit, nous avons déposé le brevet et fait expertiser la technologie Rawlemon en Allemagne au ZSW, « Zentrum für solar energie und wasserstoff Baden-Württemberg » (Centre pour l’énergie solaire et l’hydrogène, Baden-Württemberg). Il s’agit d’un test qui fonctionne avec un jet de lumière de 1000 watts perpendiculaire à un panneau photovoltaïque. De cette lumière projetée, 150 watts ressortent. Avec le système Rawlemon, la cellule photovoltaïque ne mesure que 5mm sur 5mm, et la sphère, 5 cm de diamètre. Et pourtant, il ressort également 150 watts par mètre carré : mais notez bien qu’il s’agit d’un système miniaturisé ! Sur la même surface de panneau photovoltaïque, proportionnellement beaucoup plus d’électricité peut donc être produite, et ce, tout au long de la journée. Ainsi pour résumer, à titre d’exemple : 1m2 de panneau photovoltaïque traditionnel produit 150 watts au meilleur de son rendement, soit la consommation de 5 ampoules de basse consommation. 1m2 de superficie de cellules photovoltaïques de la technologie Rawlemon, produirait  l’énergie équivalente à 500 ampoules basse consommation.

Cela remettrait alors en question le marché du photovoltaïque au niveau mondial ?

En effet, car cette invention permet d’étendre la production d’énergie solaire à tout l’hémisphère nord. Jusqu’alors, le photovoltaïque constituait l’apanage des pays ensoleillés. On ne le dit pas assez mais un panneau photovoltaïque de bonne qualité a en réalité un rendement très faible. Dans le meilleur moment de la journée, son rendement n’est que de 20% pendant environ 15 minutes. Quant à ces 20%, ils peuvent même diminuer si la position du panneau n’est pas optimum (l’angle par exemple).  De plus, un panneau photovoltaïque est opaque, il ne laisse pas passer la lumière, tandis que les sphères transparentes peuvent même aller jusqu’à remplacer des surfaces vitrées et donc produire de l’énergie sur des façades entières d’immeubles.

La grande nouveauté repose aussi sur le fait de pouvoir capter l’énergie solaire même par temps nuageux. La lumière ambiante d’une journée ensoleillée correspond à 1000 watts ; celle d’une journée nuageuse, entre 100 et 300 watts. Or, pour qu’un panneau photovoltaïque commence à produire efficacement de l’énergie, il faut au moins 400 watts de lumière ambiante. La sphère, quant à elle, concentre la lumière et commence à produire de l’énergie à partir de 100 watts. Enfin, la cellule photovoltaïque utilisée par  Rawlemon est plus performante parce qu’elle est constituée en réalité d’un mille feuilles de mini-plaques photovoltaïques de quelques microns d’épaisseurs, on les appelle les « multi junctions cells ». Imaginez alors combien mon invention peut s’avérer révolutionnaire en termes d’autonomie énergétique et d’empowerment citoyen… Notre idée majeure est de rendre accessible au plus grand nombre notre technologie et ainsi contribuer à faire changer les mentalités sur les problèmes de production et gestion de l’énergie.

 

Propos recueillis par Valérie Zoydo

 

 

 

 

 

Mise en avant

La slow economy ou le localisme économique

(Interview parue dans la lettre de l’écolonomie)

L’émergence des différents courants slow dessine les contours d’une nouvelle économie. La Slow Economy inspirée du « made in », relocalise, replace l’humain au centre des préoccupations, réhabilite le long terme et propose une approche transversale de la décélération. Raphaël Souchier, auteur de Made in Local, emploi, croissance, durabilité : Et si la solution était locale ? (Eyrolles),  est parti à la rencontre d’entrepreneurs engagés dans la voie du localisme économique. Interview par Valérie Zoydo

La lettre de l’écolonomie : La décélération appliquée à l’économie mène-t-elle à une autre forme de prospérité que celle revendiquée par le capitalisme financier?

Raphaël Souchier : Au delà d’une décélération, il s’agit surtout d’un changement de paradigme. On a fonctionné sur l’idée que le progrès passait par la croissance, la consommation et le crédit. Ce modèle tourne désormais à vide. Depuis les années 80, nous assistons en effet à un décrochage de l’économie réelle, dû à la prise de pouvoir du  néolibéralisme qui prône la dérégulation des marchés financiers, de la fiscalité et des impacts sociaux et environnementaux. Le monde de la finance -désormais hors sol et tout puissant-  a besoin que les entreprises réduisent les coûts pour produire un rendement financier maximum. Après avoir rationalisé et développé la productivité, il ne reste plus, selon lui, qu’à éliminer les humains de l’économie.

La slow economy propose un renversement de perspective : la finance doit se remettre au service de l’économie, l’économie servir la société humaine et la société réapprendre à vivre en équilibre dynamique avec son environnement naturel au lieu de le détruire de façon suicidaire. Au culte de la rapidité et de l’assouvissement immédiat des pulsions, elle substitue « l’économie régénératrice » et  une renaissance des économies locales.

 

Pourquoi cette slow economy est-elle régénératrice et à quoi ressemble-t-elle ?

RS : A quoi me sert de faire du sport si mon cœur ou mes poumons sont épuisés ou malades ? La santé, c’est à la fois celle du corps et celle de toutes ses composantes. Une croyance du siècle dernier était qu’en allant à l’international on générerait suffisamment de richesses pour que le local soit à son tour prospère. En réalité, les entreprises ont souvent quitté –et continuent de fuir- leur région d’origine pour profiter de conditions sociales, fiscales et environnementales moins strictes ailleurs. Les dérégulations successives sont le fruit de la victoire idéologique de l’élite financière.

Or il n’y aura pas de société planétaire en bonne santé tant que les économies régionales ne seront pas également de nouveau en bonne santé. Chacune des régions du monde devrait pouvoir se développer et se nourrir en affectant en priorité ses ressources à sa pleine santé, et n’échanger que ce qui est nécessaire. Ce n’est évidemment pas le cas actuellement. Les populations et les autorités de nombre de régions et de pays n’ont, en réalité, aucune maîtrise sur leurs ressources, contrôlées et parfois pillées, par les entreprises et les pays les plus puissants. La bonne nouvelle, c’est qu’une économie se développant par le moyen de la régénération de la nature et de la société sera intensive en main d’œuvre, décentralisée  et productive de richesse pour tous (rétablissement et dépollution des éco-systèmes, agriculture naturelle, éco-construction, production décentralisée d’énergie, etc).

 

Nous devons être bien conscients que ce qui nous a amenés là, ce ne sont pas des « lois » économiques, mais bien un abandon politique de souveraineté. Nos gouvernements successifs ont remis les clés de la cité et celles des coffres publics aux banques.  Changer cette situation ne relève donc pas de l’économie, mais bien du politique. Cela passe par une reconquête, par les citoyens eux-mêmes, de l’imaginaire comme du pouvoir individuel et collectif.

D’où l’importance des millions d’initiatives citoyennes que l’on voit fleurir aujourd’hui.

Ainsi en France, des clubs d’investissement locaux et alternatifs (les Cigales), créés par des citoyens pour investir ensemble dans des projets locaux ; ou Terre de Liens, mouvement qui rachète du foncier pour le mettre à disposition de nouveaux agriculteurs ; ou encore Energie Partagée, association qui investit dans la production décentralisée d’énergie renouvelable, comme à Béganne dans le Morbihan.

 

Ce localisme économique dont découle la Slow Economy, existe aux Etats-Unis et au Canada sous la forme d’un réseau d’entrepreneurs locaux appelé BALLE. Comment est-il né et que représente-t-il?

RS : Balle (Business Alliance for Living Local Economies), l’Alliance d’Entrepreneurs pour des Economies Locales Vivantes, compte 80 réseaux locaux, 30 000 entreprises et représente pas loin d’un demi million d’emplois. Ces entrepreneurs ont fédéré des forces vives locales de tous secteurs : alimentation, énergie, construction, industrie, médias, etc. Le réseau est né de l’initiative d’une femme. Judy Wicks vit à Philadelphie. En 1983, elle a ouvert un restaurant au rez-de-chaussée de sa maison. Il a prospéré, mais ce qu’elle voulait surtout c’était qu’il soit au service de ses clients et de la communauté locale. Judy était très attachée à la qualité de la nourriture. Alertée par une émission de télévision sur les conditions de vie des porcs en élevage intensif, elle s’est mise en quête d’un fermier traitant de façon humaine et traditionnelle ses animaux, et a fait la rencontre, dans la région, d’un fermier traditionnel amish. Elle a poursuivi sa démarche en collaborant avec des producteurs locaux et n’a cessé ensuite d’essayer de relocaliser tout ce qui concernait son affaire. Dès 2001, elle créait avec d’autres chefs d’entreprises un réseau local d’entreprises soutenables, « SBN – Sustainable Business of Greater Philadelphia ». La même année elle lançait, avec des entrepreneurs sociaux d’autres régions,  le réseau national BALLE. Depuis 12 ans, ce mouvement se développe et renforce les économies de leurs territoires.

 

Le localisme économique ne coûte pas trop cher aux entrepreneurs dans un monde globalisé ?

RS : Quand on achète un produit qui vient de sa région ou est vendu par un entrepreneur implanté localement, l’impact positif sur l’économie locale est forcément plus important. En Amérique du nord, les études montrent que si on achète pour 100 dollars chez un commerçant ou un entrepreneur local indépendant, 70 vont re-circuler dans la région ; alors que si on achète chez une chaine internationale, seuls 15 à 25 dollars seront réinjectés dans l’économie locale. Ces entreprises de la Slow Economy on intégré cela.

A l’échelle de l’UE  nous devrions, nous aussi, réfléchir à ce que représente, en coût réel, l’achat hors d’Europe. Nous devrions construire une position commune. Pour stimuler le localisme économique, il importe que ces idées  soient reprises partout par les réseaux d’entreprises. De même, en France, pour les collectivités territoriales qui jouent un rôle important de développeur économique ; et bien sûr les citoyens qui –en dernière instance- peuvent décider de ce qu’ils achètent ou non.  L’ère des consom’acteurs est bien là.

 

La troisième révolution industrielle et les imprimantes 3D sont-elles les meilleures alliées de la slow economy ?

RS : Jeremy Rifkin l’a effectivement montré : l’arrivée des énergies décentralisées ouvre le chemin à une relocalisation des économies. Au delà, c’est à une renaissance de la démocratie que nous devrions assister. Les imprimantes 3D, elles, sont un symbole intéressant: elles vont contribuer à mondialiser l’information tout en localisant la production. Leur généralisation réduira le transport des objets. La circulation de l’information à travers le monde devrait être libérée, et la circulation des matières et de l’énergie se limiter à ce qui est réellement utile.

Au delà de cet exemple, produire là où se manifeste le besoin grâce à un partage mondial de l’information et à une économie collaborative, n’est-ce pas cela le « glocal » ?

 

Quel objectif s’est fixé BALLE sur le long terme ?

RS : C’est à la fois simple et ambitieux : « Induire en une génération un mouvement mondial d’économies locales interconnectées qui travaillent en harmonie avec la nature pour rendre possible une vie saine, prospère et joyeuse pour tous et partout ». En effet, on le sait maintenant, la planète est capable de nourrir sa population. Ce qui nous manque c’est un peu d’imagination et d’abandonner notre peur atavique du manque et de l’autre. Bref, de sortir des vieux schémas : l’illusion de la rareté a empoisonné nos esprits.

Observez la nature : on n’y voit pas la rareté mais l’abondance. Le temps est venu pour les humains de passer enfin à la civilisation du respect des biens communs et de l’abondance partagée.

 

 

 

 

 

Mise en avant

OGM, enfin la vérité

Doit-on avant de passer à table se souhaiter bonne chance ? La question mérite d’être posée à la découverte des résultats d’une étude scientifique sur les effets des OGM sur la santé, menée dans le plus grand secret par le professeur Gilles-Éric Séralini et d’autres scientifiques, et dévoilée ce mercredi dans une revue scientifique américaine. A l’occasion de la sortie de cette étude du CRIIGEN (Comité de recherche et d’information indépendantes sur le génie génétique) fondé par Corinne Lepage, la députée européenne lève le voile sur un scandale alimentaire à l’échelle mondiale. Dans son livre La Vérité sur les OGM, c’est notre affaire !, qui paraît le 21 septembre aux Éditions Charles Léopold Mayer, elle dénonce un imbroglio juridique et politique pour échapper au fameux principe de précaution.

Lorsqu’il est question d’OGM, les acteurs débattent autour de leur nécessité -ou pas- dans l’agriculture : ceux-ci augmentent-ils la productivité agricole comme le prétendent les pro-OGM ? Est-ce l’unique solution pour nourrir 9 milliards d’individus en 2050 ? La réponse est non. Au contraire : sur le long terme, les OGM appauvrissent les sols. Ou encore, existe-t-il une pollution génétique liée à la culture ? Mais la véritable question devrait plutôt être : quels sont leurs réels impacts sur la santé ? Respecte-t-on le citoyen dans son droit à être informé ?

S’intéresser à la question des effets sur la santé

Cette problématique anime Corinne Lepage, députée européenne, présidente du parti humaniste et écologiste Cap 21, et ancienne ministre de l’environnement, (voir bio) depuis presque vingt ans : elle en a fait l’un des principaux combats de sa carrière. Une bataille entamée lorsqu’elle sollicite du Premier ministre Alain Juppé en 1996 que la France retire sa demande d’autorisation de mise en culture d’un OGM de la maison Novartis. Elle perd l’arbitrage et commence alors pour elle l’ouverture du dossier OGM et le début d’une longue histoire. Elle finit par obtenir du Président de la République et du Premier ministre le moratoire sur les OGM en février 1997. Mais elle sait bien que celui-ci sera fragile, face aux pressions du lobby à une époque où Monsanto prévoit que 50% du maïs européen sera OGM en 2000.

« Dans sa ligne de mire, les fabricants d’OGM, les lobbies, leurs alliés politiques, la Commission européenne, l’EFSA, ses experts souvent liés à l’industrie elle-même, bref, tous ont organisé leur propre irresponsabilité dans ce dossier.”

Au fil des années, à travers une enquête menée à la fois avec son regard de femme politique et d’avocate spécialisée dans l’environnement, elle a observé et s’est battue contre les rouages d’un système bien organisé et ses zones d’ombres. Dans sa ligne de mire, les fabricants d’OGM, les lobbies, leurs alliés politiques, la Commission européenne, l’EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments), ses experts souvent liés à l’industrie elle-même, bref, tous ont organisé leur propre irresponsabilité dans ce dossier. Une expertise qui a fini par la conduire aux côtés du professeur de biologie moléculaire Gilles-Éric Séralini, et d’autres scientifiques à organiser une étude scientifique dans le secret absolu, il y a deux ans.

Une première mondiale

« Sous l‘égide du CRIIGEN, association que j’ai fondée en 1999 avec Jean-Marie Pelt et Gilles-Éric Séralini et que préside aujourd’hui, Joël Spiroux, le Professeur Séralini et leurs co-auteurs publient ce mercredi 19 septembre une étude qui est une première mondiale », explique-t-elle.

Jusqu’alors, toutes les études sur l’impact des OGM avaient été réalisées par les compagnies biotechnologiques elles-mêmes et ce, pendant seulement 90 jours sur des cohortes de dix rats. Pourtant, à l’image de l’industrie pharmaceutique, les études devraient être réalisées sur le long terme, c’est-à-dire un minimum de deux ans, pour comprendre quels sont les effets d’une substance à l’échelle d’une vie humaine. Alors, pourquoi les pouvoirs publics n’ont pas cherché à réaliser davantage d’études pour analyser les véritables effets des OGM sur la santé ?

Elle parle même de « trou béant dans les connaissances scientifiques » et s’étonne que «personne ne semble s’en préoccuper. »
Images tirées du nouveau film de Jean-Paul Jaud, Tous Cobayes?, qui sortira en salles le 26 septembre prochain, librement adapté de l'ouvrage de Gilles-Eric Séralini, intitulé Tous Cobayes!, Flammarion 2012

Le livre raconte justement comment les grandes firmes se sont organisées pour les en empêcher. Car le négoce n’est rentable que si les tests ne sont faits qu’à court terme : s’il est découvert que les OGM ont un impact sur la santé, et que cela est prouvé scientifiquement, c’en est fini de leur production. C’est cela que les lobbies ont voulu combattre. « Aucun Etat, ni organisme privé n’avait en effet jamais accepté d’étudier les effets d’un OGM sur des rats durant deux ans, en analysant en détail tous les paramètres et organes », confirme la députée européenne. Elle parle même de « trou béant dans les connaissances scientifiques » et s’étonne que « personne ne semble s’en préoccuper ». Et en effet, l’étude révèle qu’à partir de quatre mois des anomalies graves commencent à se faire sentir particulièrement sur des rates nourries aux OGM. Le nombre de tumeurs est tel que le budget en analyse explose et retarde l’expérience. Certaines tumeurs finissent même par atteindre la taille d’une mandarine. Lorsqu’elles franchissent 25% du poids de l’animal (ce qui représenterait une tumeur de 15 kilos pour un humain de 60 kilos), l’euthanasie est pratiquée pour éviter les souffrances. Mais jusqu’à aujourd’hui, Corinne Lepage a été tenue au secret pour ne pas mettre en péril le bon déroulement de l’expérience dont l’industrie agro- alimentaire ne devait rien savoir sous aucun prétexte.

Restituer au citoyen son droit à être informé et protégé

Rendant à la politique ses lettres de noblesse, la députée européenne se fait un point d’honneur à restituer au citoyen son droit à être informé et protégé au niveau de sa santé. Ainsi, l’invite-t-elle à se réapproprier son destin en ayant désormais les connaissances pour agir ou pour exiger qu’on lui rende des comptes. « Comment expliquer que ce qui devrait être une des missions premières des institutions, qu’il s’agisse des ministères, de la Commission, des organes d’expertise, à savoir disposer d’informations sur la toxicité ou non des OGM, ne soit pas remplie ? Comment expliquer le degré d’irresponsabilité des ministres, commissaires et autres directeurs d’agences qui rééditent de manière constante une procédure de prise de décision qui peut conduire à un nouveau drame de l’amiante ? Comment expliquer qu’ils prêtent une oreille aussi attentive aux lobbies sans que jamais les inexactitudes relevées ne fassent l’objet d’aucune sanction ?», écrit-elle.

 » Dans cet ouvrage aux accents parfois surréalistes tant ses vérités dérangent,bousculent, embarrassent, l’ancienne ministre n’épargne personne. »

Dans cet ouvrage aux accents parfois surréalistes tant ses vérités dérangent, bousculent, embarrassent, l’ancienne ministre n’épargne personne. A travers une intrigue à la fois juridique et politique, elle met le doigt là où ça fait mal, avec parfois de l’humour et un zeste d’ironie. Elle explique comment ces acteurs s’y sont pris pour contourner la loi, se jouer d’elle, à travers la création d’un règlement, utilisé par l’EFSA. Car -a priori- le droit européen protège le citoyen, grâce à une directive information/santé qui impose des exigences en matière d’évaluation des risques. Le constat est sans appel : les rares études scientifiques existantes ont été cachées, en aucun cas complétées, sans oublier le manque de transparence dans les conditions d’émission des avis. Enfin, les incertitudes et autres bricolages juridiques ont été opérés sans vergogne, et ce, toujours sous le regard complice de l’EFSA.

Réconcilier la politique et la société civile

Il s’agit là de l’aboutissement d’un des combats d’une vie et surtout d’un acte de courage. Ne s’attaque pas à un empire qui veut. Et pour cause, la filière transgénique représente une mine d’or pour l’économie aux yeux de certains gouvernants. Ce pourrait même être l’un des plus gros enjeux financiers de l’histoire des hommes. Une véritable OPA opérée sur les estomacs à l’échelle planétaire. Si les principales variétés de soja, de maïs, de blé et de riz deviennent des OGM brevetés, 60% de l’énergie alimentaire mondiale pourrait être contrôlée.

Dans ce contexte, Corinne Lepage tente de réconcilier la politique et la société civile, en se plaçant du côté du citoyen. Pas seulement à travers son indignation mais à travers ses actes, sa sincérité, son honnêteté intellectuelle et son respect de l’humain. Indéniablement, elle prouve avec La Vérité sur les OGM, c’est notre affaire !, qu’elle fait ce qu’elle dit, quels qu’en soient les risques. D’abord en tant que juriste puis en tant que femme engagée, avec ses prises de positions, ses coups de gueule et ses inlassables enquêtes. Enfin, en tant que fondatrice et Présidente d’honneur du CRIIGEN. « Cette étude – dont chacun peut imaginer les critiques que le lobby OGM va lui réserver – a un mérite immense, celui d’exister et de mettre enfin sur la table la question de l’impact sanitaire des OGM », conclut Corinne Lepage. Et en effet, toute la mise en lumière juridique et politique que nous offre l’avocate perdrait peut- être un peu de son effet retentissant si elle n’était pas accompagnée par un travail collectif, en parallèle, de scientifiques et amis. Par leur travail et leurs recherches, ils ont prouvé que cette intuition qu’elle avait eue en juin 1996 au conseil des ministres européens –alors qu’elle était saisie du dossier OGM- était bel et bien fondée.

Valérie Zoydo ( conseillère  en comunication et en politique de Corinne Lepage, texte rédigé pour le dossier de presse).

L’EFSA, c’est quoi ?

Seuls deux OGM sont cultivés en Europe, Agence européenne d’expertise, chargée de la sécurité sanitaire et alimentaire au sein de l’UE. Créée au lendemain de l’affaire de la vache folle, elle est supposée être indépendante mais elle est en réalité accusée de céder aux conflits d’intérêts : elle est vivement critiquée dans sa procédure d’évaluation des risques par une vingtaine d’Etats membres et de nombreuses ONG. Au sujet des avis rendus dans son panel OGM (elle compte neuf panels), tous se sont révélés positifs. (Pour aller plus loin, voir notre annexe Etat des lieux du dossier OGM en Europe).

Le CRIIGEN

Le CRIIGEN, Comité de Recherche et d’Information Indépendantes sur le Génie Génétique, est une association à but non lucratif, multidisciplinaire, de scientifiques et de chercheurs sur les implications du génie génétique, ses enjeux et ses risques, et pour la protection de l’environnement et de la santé. Crée en 1999 par Corinne Lepage, Gilles-Eric Séralini et Jean-Marie Pelt, il réunit plusieurs experts en France et à l’étranger ayant participé ou participant à des missions gouvernementales ou internationales, de manière à réfléchir sur la mise en place du principe de précaution, et le contrôle du génie génétique. La vision collégiale des dossiers favorise la qualité de l’expertise, et le CRIIGEN a été consulté sur le sujet pour l’organisation de colloques internationaux, la mise en place de protocoles internationaux (Carthagène), ou de directives européennes. Il a notamment collaboré avec la Commission Européenne et les Ministères français, l’Italie, le Canada, la Chine et la Tunisie. Desgroupements, gouvernements, associations ou entreprises ont désiré adhérer pour favoriser une information indépendante, par exemple en agro-alimentaire, une information sur la traçabilité, ou un bilan international des OGM.

Recommandations de Corinne Lepageaux citoyens pour agir :

« Trois conséquences doivent être tirées de cette étude et de ses résultats en ce qui concerne les citoyens que nous sommes.
1. Même lorsque les pouvoirs publics démissionnent et ne défendent pas l’intérêt général, les citoyens peuvent agir efficacement et légalement. L’histoire de cette étude est une saga mais nous y sommes parvenus en soutenant le travail scientifique du professeur Séralini et de son équipe. Chacun d’entre nous peut exiger de ne pas consommer d’OGM dans les produits qu’il achète s’il a un doute sérieux sur la nocivité des OGM. Comment ? En évitant le maïs, le soja et le colza et leurs dérivés s’il existe une incertitude sur la présence ou non d’OGM et privilégier l’agriculture raisonnée ou bio.2. Chacun d’entre nous peut agir auprès de son gouvernement pour que des études indépendantes des groupes industriels, portant sur 2 ans et concernant un nombre d’animaux suffisant soient engagées sans délai pour analyser les effets potentiels de tous les OGM consommés sur la santé humaine. Il peut agir pour réclamer des explications sur les raisons pour lesquelles jusqu’à présent ces études ont été refusées, pour lesquelles l’EFSA n’a délivré que des avis positifs sur les OGM et cherche à obtenir la suppression dans tous les cas possibles de simples études sur 3 mois.
3. Il peut enfin militer pour un moratoire des importations en attendant le résultat des études. L’agriculture européenne ne s’en portera que mieux ».

Biographie de Corinne Lepage

Députée européenne, ex-ministre de l’environnement, présidente du parti Cap 21, et avocate spécialisée dans l’environnement, Corinne Lepage revendique des « valeurs humanistes, écologistes, sociales, républicaines et européennes ». Fervente défenseure de la troisième révolution industrielle, elle pense que la politique de demain ne se fera pas sans la collaboration de la société civile. Progressiste, de tendance sociale-démocrate, il faut repenser selon elle les clivages actuels du paysage politique et la façon dont le pouvoir est exercé, en mettant fin au jacobinisme et promouvant le dynamisme des régions.

L’Europe et l’environnement

Députée européenne depuis 2009 (groupe ADLE), elle devient première vice-présidente de la commission environnement, santé publique et sécurité alimentaire et est membre suppléante de la commission Industrie Recherche et Energie. En décembre 2009 et 2010, elle fait partie des délégations officielles du Parlement Européen qui vont à Copenhague dans le cadre de la COP 15, à Cancun pour la COP16, à Durban pour la cop17 et sera à Doha au Qatar pour la COP18. Elle a été à plusieurs reprises experte dans le cadre européen (en particulier sur le rapport d’étape du VIe programme) et a été nominée par le PNUE en 2006 parmi les 10 femmes qui, en Europe, comptent pour l’environnement. Au sein du groupe ADLE, elle est très active sur les directives OGM (dont elle est rapporteur), IPPC, RoHS, WEEE, nouveaux aliments, informations des consommateurs et sur les thématiques du changement climatique, du mix énergétique, de l’expertise non dépendante, du lien entre santé et environnement, la neutralité du net, la régulation Internet, les libertés individuelles et fondamentales.

La gouvernance écologique internationale

En 2008, elle remet au gouvernement français un rapport sur “la gouvernance écologique” qui formule plus de 80 propositions, dont 10 mesures phares, destinées à restaurer la confiance des Français dans l’information environnementale et fait notamment des propositions pour améliorer cette information, renforcer les règles de l’expertise et clarifier les responsabilités en cas de pollution qui sera présenté au niveau européen pendant la présidence française du Conseil de l’Europe en 2008.En mars 2010, aux côtés d’une trentaine d’anciens ministres de l’environnement dans le monde, elle lance un groupe de réflexion sous forme d’association (association des anciens ministres de l’environnement et anciens dirigeants d’organisation internationale de l’environnement) sur les problématiques de gouvernance écologique internationale.

1995 : la première stratégie nationale sur le développement durable

Ex-ministre de l’environnement en 1995, au moment de la présidence française du Conseil Européen, elle fait voter une grande loi sur l’air, contribue à la création du comité prévention et précaution et met en place la première stratégie nationale sur le développement durable, en 1997. Elle obtient la sortie de la puissance publique du comité amiante, le non redémarrage de la centrale superphénix et un moratoire sur les OGM.

Avocate et militante associative

Elle cofonde un cabinet spécialisée en environnement et droit public avec Christian Huglo, et se fait remarquer en défendant les sinistrés de l’Amoco Cadiz en 1978. Elle défendra par la suite des sinistrés de l’Erika en 1999 (dont des procès sont toujours en cours). Militante associative, elle cofonde le CRIIGEN (Comité de Recherche et d’Information Indépendantes sur le génie génétique). En 2011, elle remporte le prix European Women Business Law Awards, organisé par l’IFLR (International Financial Law rewiew) dans la catégorie droit de l’environnement.

Son positionnement politique : redéfinir de nouveaux clivages et coopérer avec la société civile

« La société civile ne peut désormais plus compter que sur elle-même pour assurer son avenir. », affirme-t-elle à la suite du sommet de Copenhague, en 2009. La mobilisation des ONG et de la société civile se révèle en effet nécessaire, selon elle, pour changer notre mode de développement.
Elle fonde un club de réflexion en 1996, CAP 21, qui se transformera en un parti politique démocrate, humaniste et écologiste, dont elle est présidente aujourd’hui.Cette sensibilité sociale-démocrate et sa défense de la cause environnementale l’amènent à collaborer avec le centre droit et le centre-gauche. Elle a cofondé Génération Ecologie en 1989 avec Brice Lalonde, Jean-Louis Borloo et Jean Michel Belorgey. Candidate à l’élection présidentielle française en 2002, elle soutient le candidat du centre François Bayrou en 2007, devient vice-présidente du MODEM, mais le quitte en dénonçant un problème de démocratie interne. Elle appelle à voter François Hollande en 2012.Pour elle, le clivage entre la gauche de la droite est obsolète. Rifkinienne convaincue ( cf les théories de Jeremy Rifkin) elle affirme qu’il s’agit plutôt pour le citoyen d’opérer un choix entre la centralisation du pouvoir et sa distribution. Elle prône la coopération, la démocratisation de l’énergie (cf la troisième révolution industrielle), l’Europe politique, l’économie liée à l’écologie et le social. Pour elle, le jacobinisme à la Française est un frein au progrès et aspire à un changement dans le paradigme du pouvoir. Elle est convaincue que la génération internet ne pense plus en termes de capitalisme et socialisme et juge plutôt un comportement politique et une capacité de coopération avec les ONG, les citoyens ou les entrepreneurs exerçant de bonnes pratiques sociales et environnementales. Croyant en un changement de civilisation, elle revendique la nécessité à ce que nous nous pensions collectivement comme les habitants d’une planète. V.Z

 

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Rio+20 : 10 jours décisifs pour les 20 prochaines années

La conférence des nations unies sur le Développement Durable, appelée Rio+20 en référence a la célébration du vingtième anniversaire du sommet de la terre à Rio en 1992, aura lieu dans quelques semaines dans la même ville.

Plus de 120 chefs d’états, y compris les présidents français et espagnol, et environ 50.000 délégués y sont attendus.Depuis plusieurs mois, diplomates, conseillers et représentants de la société civile  travaillent sans relâche pour finaliser un texte commun d’une vingtaine de pages sur les grands thèmes de l’économie verte (production propre, agriculture écologique, énergies renouvelables, gestion durable des forêts et océan) et nouveaux mécanismes de gouvernance (création d’objectifs de Développement durable et d’une Organisation Mondiale de l’environnement…).

Les sujets sont ambitieux mais pleinement d’actualité. D’une part l’économie mondiale vit de fortes turbulences tout en consommant de plus en plus de ressources naturelles non renouvelables avec un impact négatif sur l’environnement. D’autre part de nombreux mouvements de protestation (Occupy, Indignados, Printemps Arabe…) fleurissent tout autour du globe pour exiger une démocratie plus participative et transparente.

Une nouvelle économie
Une nouvelle économie basée sur le respect des limites de la planète, la réutilisation infinie des matières premières exige aussi une implication active et continue des différents acteurs de la société civile (ONG, entreprises…)  à coté des gouvernements nationaux et locaux. A l’heure actuelle il est très difficile de pronostiquer un quelconque résultat des négociations.

Chaque bloc géopolitique (G8, BRICS, G77, UE…) maintient une posture différente et parfois même divergente dans son propre groupe.  L’Union Européenne défend une vision forte basée sur la relance de la croissance et la création d’emplois. La Chine et les Etats-Unis veulent des accords peu contraignant et peu ambitieux. Les pays en voie de développement, en géneral, ont peur de se voir imposer un nouveau protectionnisme vert.

« Cette absence de vision collective à long terme est dû en partie à notre mode de penser linéaire et fragmenté, qui nous empêche, dans la culture occidentale dominante, d’identifier et reconnaître la complexités et inter-connections de nos problèmes (et solutions) au niveau local, régional ou global ».

Dans notre nouveau monde multi-polaires, complexe et en évolution permanente, les intérêts de chaque pays, parfois même chaque sous-region, ont des nuances différentes qui empêchent parfois de voir nos intérêts communs liés à des enjeux globaux, comme la raréfaction de l’énergie fossile, l’augmentation de la population, l’accès à l’eau potable, la pollution atmosphérique et l’infertilité croissante des sols et océan…Cette absence de vision collective à long terme est due en partie à notre mode de penser linéaire et fragmenté, qui nous empêche, dans la culture occidentale dominante, d’identifier et reconnaître la complexité et les inter-connections de nos problèmes (et solutions) au niveau local, régional ou global.

Création d’une organisation mondiale de l’environnement

Cependant, au dela d’un possible engagement international pour (re)construire une nouvelle ambition politique basée sur la création d’une organisation mondiale de l’environnement, un conseil du développement durable ou d’objectifs de durabilité, il est clair que le mouvement de fonds animé par les différentes parties prenantes et acteurs de la société civile (ONG, entreprises, think tanks…) ne s’arrêtera pas en juin. Ce processus de débats, conférences, évènements parallèles, qui aura lieu pendant les 10 jours précédents le sommet des chefs d’état aura probablement plus d’impact que une éventuelle déclaration institutionnelle pleine de bonnes intentions.

Dans un monde hyper-connecté par les réseaux virtuels et matériels, les citoyens, responsables, chercheurs, experts, divulgateurs peuvent – doivent ! – être (co)responsables de l’exécution et du suivi, à échelle locale, nationale ou globale, de politiques et d’actions concrètes vers une économie et société durables. L’utilisation permanente et continue des nouvelles technologies, réseaux sociaux et autre blogs personnels permettra – permet déjà- la multiplication de micro « printemps arabes » qui permettront de transformer, sans retour possible, le monde d’aujourd’hui vers un futur plus juste, solidaire et prospère.

Jérémie Fosse Président de l’association eco-union, directeur du Global Eco Forum, fondateur de ecodigma et collaborateur académique à Esade Business School.

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La vérité est Hacker – Partie 2

Le premier article de la « La Vérité est Hacker » clamait ce que les Hackers ne sont pas.
Cette seconde partie cherche donc à rétablir le sens original du mot suivant la nature des pionniers de cette sous-culture. ( Pour lire le premier article, cliquez ici)

L’ADN Hacker

Au début des années 60,
IBM, qui règne en maître de ces machines d’un nouveau genre,
Restreint leur accès à une élite universitaire et administrative,
Et empêche les hackers d’ausculter les entrailles de ces colosses électroniques.

Irrités par les défauts de ces grandes organisations,
Lentes Centralisées Autoritaires,
Castrant Enthousiasme Créativité et Désir,
Ils se structurent en communautés,
Petites, agiles et méritocratiques,
Associant l’inventivité de l’individu à la force de la tribu.

Cette organisation décentralisée permet aux Hackers
Que l’échec des uns ne mette pas en péril l’ensemble,
Mais que chaque succès vienne amplifier la réussite collective.

« Ils rêvaient d’un autre monde,
Où l’ordinateur serait démocratique »

Ils rêvaient d’un autre monde,
Où l’ordinateur serait démocratique,
Où son accès serait illimité, accessible à Tous,
Et ces machines seraient la source d’un progrès universel.
De cette idée folle naquit l’ordinateur personnel
Dont l’Apple II est le premier grand succès.

Ah ! Il leur fallut travailler dur !
Dans ces communautés, le respect se gagnait au Mérite,
Suivant l’enthousiasme et les connaissances de chacun.
Travail Machine Passion !

Corps Robotique et Intelligence Artificielle

Oubliant Corps Couple Argent parfois,
Pour l’exigence d’une Machine devenue Maîtresse
Qu’ils souhaitent doter de capacités humaines.
Corps Robotique et Intelligence Artificielle,
Homme et femme bionique,
L’Androïde comme fantasme ultime
Représente le désir de symbiose de ces hackers avec la machine,
Adoration pour cette extension d’eux-mêmes,
Que certains nommeraient Phallique !

« Ils rêvaient donc d’une société,
Où la circulation de l’information serait Libre »

Au delà de l’ordinateur,
Il faut aussi libérer la connaissance,
Faciliter son partage pour accélérer le progrès,
Afin d’améliorer le monde, Pardi !
Ils rêvaient donc d’une société,
Où la circulation de l’information serait Libre.
Leur vision devint réalité 30 ans plus tard,
Quand Tim Berners Lee inventa l’Internet.
Inspiré par leur culture,
Il déposa son invention dans le domaine public,
La rendant libre de droits et accessible à tous.

Alors naissent les premiers enfants de l’Internet,
Les Blogs avec LiveJournal et Blogger,
Puis les réseaux sociaux avec MySpace Facebook et Twitter,
Connectant les personnes entre elles,
Facilitant encore le partage,
Comme l’indique le célèbre slogan de Facebook :
« Life is for Sharing ».

Peut-être me direz-vous que
De partage de connaissances vous n’en voyez point,
Que les réseaux sociaux ne sont à vos yeux
Qu’une nouvelle forme de téléréalité planétaire dont le seul but,
– Bien loin de faciliter le Progrès en partageant la Connaissance –
Est de libérer du temps de cerveau
Pour diffuser toujours plus de publicités.

L’Humain devenu Produit,
Ses Ressources toujours plus aliénées
Et même la plus précieuse d’entre elles :
Le Temps de Vivre.

Quel cynique vous faites ! Et pourtant,
Vous n’avez pas complètement tort …

« Grâce aux hackers, la technologie permet désormais
De partager et diffuser instantanément
Connaissances et Conneries comme jamais auparavant ! »

Facebook Twitter, peu importe le nom de chapelle !
Grâce aux hackers, la technologie permet désormais
De partager et diffuser instantanément
Connaissances et Conneries comme jamais auparavant !

Il faut donc laisser ces technologies infuser en nous,
Se donner le temps d’apprendre à en sortir le meilleur,
Tout en arrivant à se protéger du pire.

Ce futur improbable ne manquera probablement pas d’arriver,
Comme si l’Homme n’avait de cesse de se laisser aliéner,
Afin de pouvoir à nouveau se libérer,
Puisque rien n’est jamais définitivement gagné,
Tel Sisyphe condamné à toujours remonter son rocher.

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La Verité est Hacker de Antoine Brunel est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution 3.0 non transposé.

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Where the hell is Rezolemag?

Vous ne trouvez plus notre magazine dans ses points de vente? C’est normal, car il se refait une beauté! Aidez-nous à sortir une nouvelle version du mag, qui serait en trois langues, Français, Anglais, Espagnol. Comment nous aider? En apportant vos contributions, vos idées, ou un coup de pouce financier! Participez à notre Tour de Babel journalistique! Pour plus d’informations écrivez-nous à valerie.rezomag@gmail.com.

Can’t find anymore our printed magazine? Of course, it is receiving a new treatment at the « beauty parlor »! Help us to rise up a new version, wich would be in three languages, French, English and spanish! How could you help us? By giving your contributions, ideas, or giving us an hand with some… pennies! Get into our Journalistic Babel tower. For more information  wrtie us at valerie.rezomag@gmail.com.

No encontráis nuestra revista en sus puntos de venta habituales? Normal. ¡Se está haciendo un lifting! Ayudadnos a sacar una nueva versión de la revista en tres idiomas, inglés, francés y español. ¿Que cómo ayudar? Aportando colaboraciones, ideas, o con una pequeña aportación económica. ¡Participa en nuestra torre de Babel periodística! Para más información, dirígete a valerie.rezomag@gmail.com

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Ici, Maintenant

 

© Jean-Benoit Kauffmann

Jean-Benoît Kauffmann est né à une date inconnue, quelque part entre ici et ailleurs. Il vit à Barcelone depuis cinq ans bientôt et parcourt les paysages urbains pour rendre visible l’invisible depuis longtemps déjà. Il se définit comme un “citoyen du monde”, sans frontières. De 1968 à 1973, il est parmi les grands voyageurs et traverse ses années hippies en Afghanistan et dans d’autres pays du Moyen-Orient. En 2006, certaines photos de ces années d’aventures et de rencontres ont été publiées dans l’ouvrage Les années cool: Une jeunesse de rêves, aux éditions du Panama, Paris.

© Jean-Benoit Kauffmann
© Jean-Benoit Kauffmann
© Jean-Benoit Kauffmann
© Jean-Benoit Kauffmann
© Jean-Benoit Kauffmann
© Jean-Benoit Kauffmann

Aujourd’hui, en cette période de grands bouleversements et de révolution sociétale, regarder les photos de Jean-Benoît nous rappelle que de tout temps les gens ont souhaité changer leur monde, leur espace de vie. Pour cette exposition 2012, il a arpenté les rues de Barcelone comme il le fait chaque jour, avec en bandoulière discrète son appareil photo pour shooter ce qu’il nomme sa “fascination pour l’interaction entre l’espace et le temps”, indissociables. Cet amoureux de science-fiction livre ici des clichés sous forme de diptyques où l’on observe un même espace, un même plan, d’abord habité et puis vidé quelques instants plus tard de ses passants. Une manière de percevoir la ville et ses architectures dans tous ses états, avec ou sans humanité.

Coco Bernard Taboada

© Jean-Benoit Kauffmann
© Jean-Benoit Kauffmann
© Jean-Benoit Kauffmann
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La vérité est Hacker – Partie 1

 

Le film Matrix met en scène un hacker à travers le personnage de Néo

Retrouvez la nouvelle chronique « en vers » d’Antoine Brunel, spécialiste de la culture Hacker et cyberpunk.

Il est probable qu’en évoquant les hackers,

Cela vous rappelle au mieux ces “hacktivistes” étranges,
Ces vengeurs masqués tels WikiLeaks et Anonymous,
Qui défient les puissants de ce bas monde
Pour défendre la liberté de ce lieu public qu’est l’Internet,
Et donc celle de tous.

Insaisissables Hackers

Au pire, peut-être prendrez-vous peur,
Vérifiant que votre antivirus est activé,
Fermant navigateurs écoutilles et fenêtres,
Craignant d’être victime d’une attaque
Perpétrée par un pirate virtuel sans foi ni loi,
Qui dérobe des numéros de cartes bancaires bien réels,
S’introduisant dans les systèmes informatiques
Dans l’unique but d’extorquer des informations
Et d’en retirer un profit maximal … Brrr !

Halte à l’amalgame, ne cédez pas à la Panique !
Vous vous trompez Nous nous trompons !
Les hackers Ne Sont Pas des pirates informatiques.
Bien au contraire, ce sont des empêcheurs de tourner en rond,
Jongleurs géniaux de bits en octets,
Créateurs révolutionnaires inconnus,
Qu’on assassine sémantiquement
En les assimilant à des criminels
Alors qu’ils n’en sont pas !

Car malgré le scepticisme de Scully, Mulder aurait dit
Que la vérité sur le sens du mot Hacker est ailleurs …

L’imbroglio apparaît déjà dans la très démocratique encyclopédie Wikipedia
Qui lui donne pas moins de 14 sens différents !
Dès lors, chacun possédant sa propre opinion du mot,
Toute discussion et réflexion constructive est rendue d’autant plus complexe
Qu’il faudrait commencer par définir précisément de quoi l’on parle,
Ce que bien sûr l’on ne fait Jamais !
Alors, Hacker black hat, white hat ou même grey hat,
Et bientôt fuchsia hat ?

Que de chapeaux !
Telle Alice suivez donc le lapin – votre serviteur –
Pour découvrir le sens original du royaume des Hackers.
Car, en lisant cet article publié sur Internet,
Depuis votre ordinateur personnel,
Ou même votre smartphone,
Vous Vivez actuellement une Expérience Hacker
Puisque ce média a été intégralement conçu par eux…

Le Progrès Hacker ? “Seulement” 4 révolutions en 30 ans

Car cette sous-culture de l’univers cyberpunk,
Dont la prestigieuse histoire est aussi méconnue
Que ses nobles valeurs,
A été à l’origine de pas moins de 4 révolutions technologiques
Au cours des 30 dernières années.

Qui dit mieux ?

Un peu d’Histoire

A la fin des années 50,
Une bande d’étudiants hypnotisés par les ordinateurs du MIT,
Se convertirent en enthousiastes virtuoses de l’informatique.
Ils travaillaient parfois 30 heures, sans dormir ni manger,
Dépassant leurs limites pour explorer celles de l’ordinateur,
Abandonnant leur corps à une symbiose électronique,
Pour – entre autres – jouer du Bach,
Programmer un jeu d’échec capable de battre des professionnels
20 ans avant les débuts du si célèbre Deep Blue d’IBM…

Il s’agit donc d’un heureux accident de l’Histoire
De l’improbable conquête par d’illustres inconnus
D’un puissant outil réservé à une élite,
Qu’ils démocratisèrent avec l’avènement
De l’ordinateur personnel, de l’Internet,
Du smartphone et enfin des réseaux sociaux.

Chacun de leurs exploits collectifs
– Et ils furent nombreux –
A permis à leurs valeurs de prospérer,
A leurs communautés méritocratiques et décentralisées
De s’étendre comme une trainée de poudre
Devenue aujourd’hui la plus grosse bombe de la planète.

Antoine Brunel* (la suite au prochain épisode…)

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La Verité est Hacker de Antoine Brunel est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution 3.0 non transposé.

Qui est Antoine Brunel?

Consultant SEO, il donne donc une cohérence à la stratégie online de ses clients pour qu’ils profitent au mieux des moteurs de recherche. Il s’assure donc que leur plateforme technique est saine afin que Google puisse lire et comprendre la structure d’un site sans erreur ni penalité. Il conseille aussi de communiquer d’une certaine manière plutôt que d’une autre pour favoriser le référencement naturel, il affine parfois le message, le contenu du site pour le rendre plus cohérent avec les recherches sur Google.
Il écrit de temps en temps sur un blog (revonsunpeu.net), et vient d’achever un travail d’investigation pour clôturer son master en Communication, Marketing et Business web a l’UAB. Ce travail portait sur les hackers, qui furent les createurs de l’ordinateur personnel et de l’internet, et pas des e-criminels comme on peut le croire aujourd’hui.
Prenant conscience de ce probleme (http://en.wikipedia.org/wiki/Hacker), il a donc voulu démontrer le changement de définition du mot Hacker entre 1960 et aujourd’hui en utilisant:
1- Un livre de référence sur les hackers (Hackers, Heroes of the Computer Revolution de Steven Levy). Ce livre raconte l’histoire des hackers depuis l’origine, il en a tiré certaines « caractéristiques », qui permettent de les définir d’une manière plutôt précise.
2- Google. Sur une série de mots permettant d’accéder au sens du mot « hacker » (definition hacker, qu’est ce qu’un hacker, etc), il apparait qu’une majorité de résultats concerne des mouvements activistes (hacktivistes comme Wikileaks, Anonymous), voire des e-criminels plutot que des hackers dans le sens original du mot.
Puisque Google mesure la satisfaction des internautes pour qualifier les sites, cela siginifie donc que les gens qui recherchent le sens du mot hacker sont plutôt satisfaits par des sites qui les définissent comme des hacktivistes ou e-criminels plutôt que comme de véritables hackers.
Il y a donc bien eu une dérive du language, probablement créé par un neologisme mal défini, et une connotation plutôt négative dans les médias des les années 80.

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Beautiful Maladies, from Galleri Ramfjord (Norway)

© Merete Løndal

Like the 1998 Tom Waits album, this exhibit is about beauty in decay, about things or beings that are crumbling or wasting away in sickness. These are dark motifs, but then again, could it be that what we perceive as gloom – conveyed through phenomena such as deterioration, decadence and loneliness – is nothing but the traces of a life lived?

Working in photography, painting and mixed media, the artists selected to represent Galleri Ramfjord at .NO in NYC (in dec. 2011) portray various forms of disintegration – of the human body, mind and surroundings. The thematic and technical range reflects the variety in the artists’ backgrounds, genders and ages, and offers a remarkable snapshot of an alternative Norwegian contemporary art scene. The artists are either self-taught or trained at institutions abroad. To some extent, they represent a counter-culture against the theory-driven contemporary art currently prevailing at many culture venues in the Norwegian capital.

« The artists portray various forms of disintegration – of the human body, mind and surroundings. »

Common to all of these artists is their interest in figurative representation. Both Henrik Uldalen and Morten Tyholt place great emphasis on craft in their oil paintings, but each take a different technical tack: classical realism and trompe l’œil. While Uldalen probes the innate loneliness of humankind, Thyholt explores the relationships between objects and the people who owned and lived with them. Merete Løndal works in egg tempera and oil, creating thick surfaces consisting of several layers of paint. Her style is also figurative, but the subject matter reads as fragmented and partially blurred as color areas merge into one another like reflections in a window pane.

 

« Both artists have political elements in their work, but Søbye is particularly concerned with art’s role as a critical voice. His artistic practice is largely a philosophical contemplation of ethical and moral issues. »

 

The corruption of society in human faces and bodies

Reinhardt Søbye and Trygve Åsheim both use digital images as the point of departure for their narratives, reworking these initial collages with oils or acrylics. Their motifs represent various forms of decay – Åsheim’s deserted industrial landscapes bear witness to the worship of material growth of our present-day world, while Søbye depicts the corruption of society in human faces and bodies. Both artists have political elements in their work, but Søbye is particularly concerned with art’s role as a critical voice. His artistic practice is largely a philosophical contemplation of ethical and moral issues.

The photographic work on display is created by Ole Marius Jørgensen, Marie Kristiansen and Anja Niemi. Kristiansen references fashion photography and its decadent depictions of the female body. Jørgensen’s images were shot in a closed-down mental hospital, and the institution’s dilapidated, but untouched interiors become an unnerving remainder of what occurred in the building through the ages. Niemi captures a different kind of human decomposition – she calls into question the photographer’s presence by portraying herself as a transparent figure. To Niemi, the photograph’s absolute particuliarity holds special importance, and her motifs are always representations of random moments in time.

More information:

GALLERI RAMFJORD
www.galleriramfjord.no

Galleri Ramfjord is a contemporary fine art gallery established in 1998.
Elisabeth Ramfjord originally wanted to create a space for young artists. Since 1998, the Gallery has grown to include more established artists, a webshop, and the premises now cover 400 square meters on St. Hanshaugen in Oslo, Norway.
The gallery is dedicated to promote Scandinavian artists, providing original art works from approximately twenty artists in painting, sculpture and photography.
Artists: Ole Marius Jørgensen, Marie Kristiansen, Merete Løndal, Anja Niemi, Reinhardt Søbye, Morten Thyholt, Henrik Uldalen (bildet) & Trygve Åsheim

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Noticias desde un golpe de estado inesperado

Bamako, Mali

¿Has oído que no recomiendan salir a la calle? ¿Dónde estáis? Me llegaba este sms mientras estábamos reunidos con la Federación Internacional de los Derechos Humanos (FIDH) en la sede de UNICEF desarrollando un proyecto para prevenir el trabajo infantil en el sector minero en Mali. Al poco rato entraba en la sala el Director de UNICEF. Su rostro me dio a entender que el sms iba en serio. “¿Todo bien?” – “No, no todo bien” me dijo saliendo con los responsables de la organización.

“Todos a vuestras casas, encerraros y no salgáis hasta que os avisemos”. Crédito Fernando Casado

« Estaban confiscando coches. »

Al poco rato nos contaban que no podíamos salir del recinto hasta nueva orden. Al parecer había habido una revuelta militar en Kati, población a 18 kilómetros de Bamako, y era impredecible lo que podría ocurrir. El personal del recinto subía y bajaba las escaleras con nerviosismo. “Todos a vuestras casas, encerraros y no salgáis hasta que os avisemos”. Los militares se habían rebelado ante el ministro de defensa, que había acudido para calmar el malestar que arrastraban hace semanas por las malas condiciones con las que tenían que luchar en la guerra del norte. Llevábamos días siguiendo las protestas de las mujeres e hijos de los militares, y era de esperar que tarde o temprano ellos también saldrían a la calle. Pero al parecer esta vez iba más en serio. Se habían apoderado del arsenal de armas y estaban confiscando coches. Decían que venían a Bamako e iban a por el Palacio Presidencial en Koulouba.

La guerra en Libia desestabiliza la zona
Malí ha sido un país sorprendentemente estable a nivel democrático e institucional, a pesar de ser el 175 de los 187 países en índice de desarrollo humano, tener una esperanza de vida de sólo 49,2 años, y con el 44% de la población viviendo sin acceso a agua potable y el 51% en condiciones de pobreza extrema.
Sin embargo, este último año su estabilidad se ha visto amenazada. La sequía ha generado un estado de emergencia por crisis alimentaria y la guerra en Libia ha ocasionado el retorno de milicianos con armamento sofisticado que ha acelerado la guerra en el norte y puesto en desventaja al ejercito nacional.
A pesar de ello, nadie esperaba un golpe de estado el 21 de marzo. Dentro de un mes se celebraban elecciones y el presidente había afirmado que no se iba a presentar. Todo indicaba a que se iban a realizar de manera estable y ordenada.

"Se oían cañonazos, ráfagas de metralleta, detonaciones". © AFP/ Habibou Kouyate

« La incertidumbre se adueñó del ambiente y las palabras empezaron a evolucionar: de manifestación a revuelta, a motín, finalmente a golpe de estado ».

Desde el balcón donde estábamos alojados se divisaba la majestuosidad del río Níger, con el característico baile de colores azulados y anaranjados que adquiere cuando se pone el sol. Entonces empezaron los disparos. Y ya no pararon hasta el amanecer. Se oían cañonazos, ráfagas de metralleta, detonaciones. Se veía cómo estaban atacando el palacio presidencial así como la zona ministerial, entregada por Gadafi como gesto de hermandad y relación privilegiada que siempre mantuvo con el pueblo de Mali. La incertidumbre se adueñó del ambiente y las palabras empezaron a evolucionar: de manifestación a revuelta, a motín, finalmente a golpe de estado.

Militares en Bamako el 22 de marzo, Credito (AFP/HABIBOU KOUYATE)

Llegaban noticias confusas, al principio inauditas pero con el tiempo se fueron confirmando. Los rebeldes han ocupado la televisión pública ORTM y la radio; los rebeldes han entrado en el palacio presidencial; los rebeldes han capturado a varios ministros; los rebeldes tienen el control completo de la ciudad.
Durante los siguientes días se fue instaurando un toque de queda respetado sobretodo por la comunidad internacional. El estado anárquico y el vandalismo característico en estas situaciones duró apenas dos días. Acostumbrados a cortes eléctricos constantes, sorprendía la regularidad de acceso a electricidad que se ha tenido desde el golpe. Con ella venía internet, que milagrosamente funcionaba también sin interrupciones, y a través de internet el flujo de noticias vía Twitter y blogs sociales, documentando casi al momento los acontecimientos.
El viernes, día de mezquita para este país mayoritariamente musulmán de 15 millones de personas, reinó un silencio sepulcral que invitó a la reflexión y a todo tipo de conjeturas.

¿Ha sido un golpe inesperado fruto de la cólera militar que se ha ido incendiando a medida que se acercaban al palacio presidencial? ¿O hay intereses detrás del golpe que están instrumentalizando las protestas para boicotear las elecciones? ¿Hay alguna fuerza internacional detrás debido a la falta de determinación que había mostrado el presidente ATT en la lucha contra AQMI en el norte? ¿Y donde está el presidente? ¿En manos de una embajada internacional? ¿Escondido en un campamento militar preparando la contraofensiva? ¿O en manos de los rebeldes en el cuartel de Kati tal como apuntaban algunos?

Amadou Sanogo, leader de la junta intervino en la ORTM, llamando a la población que deje de hacer pillajes y que respete orden

Durante el fin de semana la tranquilidad se prolongó de manera irritante. Se rumoreaba sobre una contraofensiva por parte de los partidarios del presidente, pero la ciudad callaba y se intuían negociaciones entre ambas partes. Al fin y al cabo, solo había hablado un Capitán (Amadou Sanogo) pero los coroneles y generales de alto rango todavía no se han pronunciado.
Por otro lado, la comunidad internacional ha denunciado el golpe de estado, así como los 10 partidos principales que se presentaban a las elecciones; prácticamente todas las agencias han cancelado las ayudas de cooperación; y las acciones de las empresas mineras, de las que el gobierno es 20% accionista, se han desplomado en la bolsa. Así que si el golpe ha sido un éxito militar, está siendo en fracaso económico en todos los frentes. Un fracaso inmerecido para este país que ya luchaba por superar las adversidades de pobreza extrema y crisis alimentaria este año, y que lo último que necesitaba es un golpe de estado que sólo limita las oportunidades para el desarrollo que su pueblo merece.

Dr. Fernando Casado Cañeque. Director del Centro de Alianzas para el Desarrollo (www.globalcad.org)

Nota: Fernando Casado está informando a diario sobre los eventos de la situación en Malí a través de su cuenta de Twitter: @Fernando_Casado

Para profundizar en el tema, Rezolemag les recomienda este link:
http://panel.vudeo.org/

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« Je voyage à travers la peau des autres »

Joana Catot fait du tatouage un art itinérant

« Le tatoueur doit être vulgaire, son aspect louche et sa physionomie inquiétante ».
Voilà un cliché qui a la peau dure. Et c’est Bruno, le maître tatoueur le plus reconnu de France, qui s’en amuse dans son livre Tatoues, qui êtes-vous ? Pour pénétrer dans le studio de la tatoueuse barcelonaise Joana Catot, il faut se rendre à Gracia, quartier nord de Barcelone en pleine gentrification. Au lieu de descendre dans un studio mal aéré et sans hygiène, on monte les escaliers d’un immeuble un brin bourgeois. Une femme aux traits radieux et au sourire grand comme une banane ouvre la porte. En refermant, on laisse derrière-nous toutes nos idées reçus sur l’identité du tatoueur. Elles n’ont pas cours ici.

L’art de dessiner sur la peau
Pour la quarantenaire catalane, le tatouage n’a rien d’une évidence. Au début. Car c’est plutôt le chemin de la couture qu’elle prenait quand, à 26 ans, elle avait déjà deux gosses et un avenir tout tracé dans un petit village de l’arrière-pays catalan. Mais à force de la voir dessiner, une amie lui conseille de s’inscrire à des cours. Elle a 26 ans. Ecole des arts appliqués de Vic, puis école de design et art Eina de Barcelone. Joana devient designer graphique, s’éclate dans une profession qui lui permet de bien gagner sa vie tout en conservant une touche artistique. « Au final, j’ai étudié 10 ans et j’ai acquis une solide formation en arts plastiques et en design », résume-t-elle.

Apprentie artiste, elle a dessiné et peint sur de nombreux supports, mais jamais sur un support vivant et mouvant. « Un jour j’ai vu un tatoueur dessiner sur la peau de quelqu’un. Ce n’est pas immédiatement le travail qui m’a intéressé mais plutôt l’idée de peindre non pas une toile, mais la peau, qui est mouvante, qui vieillit, qui ne peut ni s’acheter ni se vendre, qui ne peut pas s’exposer dans un musée… ça m’a paru fascinant ! C’est là que je me suis dit que je voulais sentir ce qu’il se passe quand on peint un corps humain, qu’on ne peut pas l’effacer et qui se marque dans la douleur. »

« Le tatouage est un art parce qu’il crée »

Cette artiste de formation voit-elle le tatouage comme une forme de création artistique ? « Qu’est-ce que l’art ? Je l’ignore. Mais l’autre jour dans le métro j’ai vu une personne avec un tatouage très vieux et très moche. Ça m’a révulsée ou … intéressée. Je pensais que l’art est beaucoup plus dans ce qui me touche et m’émeut que dans ce que je trouve joli. » Pour l’artiste tatoueur Mariano Castiglioni, « Il est difficile d’expliquer ce qui est art et ce qui ne l’est pas, mais le tatouage est un art parce qu’il crée. Souvent, c’est une idée partagée avec le tatoué qui se créée. » Reste que pour Joana, seuls certaines perles parviennent à atteindre un niveau artistique : « Je suis une très bonne tatoueuse, une très bonne designer graphique, mais je ne suis pas une artiste. Par contre, il y a des tatoueurs avant-gardistes en Europe centrale qui sont bien en avance sur mon travail. Ils font des choses hallucinantes ! »

Autodidacte dans un univers sous testostérone
Si Joana Catot accueille aujourd’hui ses client(e)s dans un studio débordant de livres spécialisés récoltés au cours de ses pérégrinations, c’est après avoir cherché par tous les moyens à apprendre cette technique pour laquelle à l’époque, il n’existait ni diplôme ni formation reconnue (aujourd’hui, le gouvernement catalan oblige les tatoueurs à suivre un cours d’hygiène sanitaire et il existe également un diplôme depuis septembre à Barcelone). « Ça a été très difficile de trouver quelqu’un qui veuille bien m’enseigner à tatouer, parce que c’est un monde très fermé. J’ai finalement trouvé quelqu’un qui a bien voulu me l’enseigner, mal, mais c’est à partir de là que j’ai commencé à tatouer dans mon village. Ma chance, c’est qu’à l’époque les tatouages étaient petits, et comme je ne savais pas bien tatouer, ça me convenait. A mesure que les tatouages ont pris de l’ampleur, moi aussi j’ai pris de l’expérience. »

« Barcelone, une oasis de studios de tatoueurs et de tatoués en tout genre. Inutile d’essayer d’y marcher dix minutes sans croiser une épaule ou un avant-bras tatoué. »

Puis la rupture personnelle vient tout accélérer : « Je tatouais de plus en plus dans mon village. Puis j’ai divorcé et je suis venu m’installer à Barcelone. Là, le tatouage est devenu omniprésent pour moi. » Barcelone, une oasis de studios de tatoueurs et de tatoués en tout genre. Inutile d’essayer d’y marcher dix minutes sans croiser une épaule ou un avant-bras tatoué. Joana travaille dur dans un atelier très populaire dans le quartier du Raval. Après cette expérience, elle est mûre pour s’y dédier à 100%.

Anthropologie itinérante du tatouage
Mais quelque chose manque. Tout cela est trop mécanique, pas assez créatif. « Probablement du fait de mon héritage des Beaux-Arts et de l’histoire de l’art, j’ai commencé à me demander ce qu’était vraiment le tatouage. D’où vient-il, que sent-on, ce qu’en pensent les gens. » Le hic, c’est que, bien qu’elle adorerait rencontrer des gens pour en débattre, « dans ce pays il n’y en a pas. »
Internet devient alors une véritable mine d’or pour assouvir son besoin d’en savoir plus sur les différents visages de cette pratique vieille comme le monde. Peu à peu, la source se tarie face à la soif de savoir de la tatoueuse : « Sur Internet, je trouvais beaucoup de récits, mais il y a beaucoup de copier-coller, tu te rends compte que sur les 100 articles qui parlent d’un lieu, une seule personne s’y est vraiment rendue. »

« Tous les peuples du monde sont tatoués »

Reste une solution, celle d’un nouveau départ : « J’étais très intéressée par Hainan, une île au sud de la Chine. Sur Internet, certains disaient que oui, d’autres que c’était fini, et d’autres encore qu’à Hainan, seules les femmes continuaient à se tatouer. Eh bien j’y suis allée ! L’expérience a été tellement bonne que j’ai décidé de voyager dans toutes les parties du monde pour voir si on se tatouait, comment, si la pratique disparaissait ou au contraire y retrouvait une nouvelle jeunesse ».

Comme elle, le tatouage semble ne jamais s’avouer vaincu. Entré dans le dictionnaire français à la moitié du XVIIIème siècle avec les récits de voyageurs dans les îles du Pacifique ou en Afrique, il est aussi vieux que le monde et plus diffus que le football : « Ce qui me paraît fascinant, c’est que tous les peuples du monde sont tatoués, des Inuits aux Africains, dont les scarifications sont pour nous des tatouages, aux Indiens d’Amérique, en passant par les Russes … tout le monde ! » Myanmar, Bénin, Californie, Hainan, Algérie, ses destinations sont aussi éculées que diverses, mais ont toutes pour point commun la quête d’autres pratiques de tatouage. « Je voyage à travers la peau des autres », sourit-elle.

« Je voyage à travers la peau des autres », sourit Joana Catot

Au retour, les anecdotes et les découvertes sont si nombreuses qu’elle se met à les partager au cours de conférences, de la Catalogne à l’Argentine. « Ma dernière destination a été le Cameroun, où je suis me suis rendue avec l’anthropologue Joan Riera. Nous avons été à la rencontre d’un peuple pygmée, les Baka, et nous avons eu la chance d’assister à une cérémonie d’initiation où on affinait les dents de jeunes adolescents. Nous avons aussi observé une séquence de scarification de jeunes filles. Mais c’était de petits tatouages. »

Les femmes, dernières gardiennes du tatouage
Pourquoi Joana a-t-elle emprunté les routes si peu courues qui mènent aux différentes cultures du tatouage du monde entier ? Difficile à dire, tant tout pour elle est accompagné des superlatifs « brutal » ou « fascinant ». Mais un détail retient l’attention. Seule femme tatoueuse de son âge en Espagne, autrement dit pionnière de la féminisation de cette pratique en Europe, elle découvre une réalité inverse au cours de ses voyages : dans des cultures où le tatouage est en perte de vitesse, ce sont les femmes qui continuent de le porter. « Les hommes sont les premiers à avoir des contacts avec le monde moderne. Les habitants de l’île de Hainan doivent aller vendre sur les marchés et leurs peintures corporelles sont la risée des Chinois. Les Machis de l’Amazonie au Brésil retirent leurs piercings quand ils vont travailler en ville. Pendant ce temps, les femmes restent dans la communauté. A Hainan, il ne reste presque plus de tatouées. » De quoi rasséréner, et lui donner envie de devenir la voix de ces femmes et leurs pratiques culturelles qui tombent en désuétude.

Le tatouage n’est pas une mode, mais il est à la mode
Rien à voir avec les pays occidentaux où ce que l’on considérait encore comme un passe-temps de taulard au temps de Bruno devient une preuve de goût chez les nouvelles générations. « Le tatouage est à la mode mais ce n’est pas une mode », nuance Joana, satisfaite : « C’est bien que le tatouage ne soit pas qu’une curiosité car c’est beaucoup plus profond que ça : c’est autant une manière d’être, d’expliquer, de revendiquer quelque chose que tu as besoin de démontrer, de montrer, de souffrir… Sans ce mouvement, beaucoup de travaux ne seraient pas acceptés et nous n’aurions pas non plus un matériel de cette qualité. »

Pour le psychologue et psychanalyste Serge Tisseron, « le tatouage a toujours été utilisé. La différence aujourd’hui, c’est qu’il se montre. Nous visons une période où les gens cherchent à affirmer leur originalité. » Un autre aspect positif tient à cœur à Joana. La mode en Occident semble avoir ravivé la flamme de certaines communautés qui avaient abandonné le tatouage : « Les Indiens Yurok de Californie que j’ai rencontré il y a quatre ans ne se tatouaient plus depuis 50 ans et, soudain, un groupe de 12 femmes a recommencé. »

Emmanuel Haddad

Le site de Joana Catot :
http://joanacatot.com/

Mise en avant

La force Al-Qods, armée de l’ombre du régime iranien

crédit : Juliana Peña

Soupçonnée d’implication dans la tentative d’assassinat de l’ambassadeur saoudien aux Etats-Unis en octobre dernier, cette unité d’élite est considérée comme le fer de lance de la « mollahcratie » de Téhéran. Sa mission ? Préserver et promouvoir les acquis de la révolution islamique. En toutes circonstances.

Presque dix ans avant de chasser du pouvoir le chah Mohammad Reza Pahlavi et de brandir, triomphant, l’oriflamme de la révolution islamique, l’ayatollah Khomeyni avait déjà esquissé à grands traits les contours de sa pensée politique. Dans un ouvrage paru en 1970 et intitulé Le Gouvernement islamique, sorte de « petit livre vert » longtemps classé parmi les publications interdites en Iran, le futur maître du pays y exposait sans détour sa vision d’un système « idéal ». Un système fondé, selon lui, sur la prééminence absolue du pouvoir religieux sur le champ politique – doctrine plus connue sous le nom de velayat-e faqih (littéralement « gouvernorat du juriste-théologien »). Jugée « anachronique », y compris dans les rangs supposés fidèles du clergé chiite, cette idée, pensait-on alors, aurait tôt fait d’être reléguée aux oubliettes de l’histoire.

En février 1979, pourtant, quelques jours seulement après avoir pris avec autorité les rênes du pays, l’ancien exilé de Neauphle-le-Château, près de Paris, jetait les premières bases de son ambitieux projet. Parallèlement, un noyau dur chargé d’assurer la protection du nouveau régime était créé : l’embryon des futurs pasdarans, les Gardiens de la révolution. Un corps redoutable destiné, selon les termes gravés dans le marbre de la Constitution, à « répandre la jurisprudence de la loi de Dieu partout dans le monde ». Déjà à l’époque sourdait en filigrane l’ardente volonté de faire du khomeynisme un exemple, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des frontières. La force Al-Qods, fondée deux ans après la fin de la guerre contre l’Irak (1980-1988), en sera l’instrument privilégié. Son nom, d’ailleurs, s’inscrit dans cette perspective : « Al Quds », en arabe, désigne Jérusalem. Tout un symbole…

Emanation directe des Gardiens de la révolution, dont elle représente la frange la plus aguerrie, cette force clandestine est placée, à sa création, sous la coupe d’Ahmad Vahidi. Le choix du successeur de Khomeyni, Ali Khamenei, aujourd’hui Guide suprême et véritable dirigeant de l’Iran, n’a rien de fortuit. L’homme, commandant du renseignement militaire des pasdarans, est le mieux placé pour « exporter la révolution » et faire face à toute menace potentielle envers les intérêts nationaux. Dans le sillage de ce militaire d’expérience, loué par les mollahs pour ses « états de service » au Liban dans les années 1980 – participation à la fondation du mouvement chiite Hezbollah en 1982 en réaction à l’invasion israélienne, implication directe dans l’attentat contre le QG des marines à Beyrouth en octobre 1983 –, la force Al-Qods s’acquitte de sa mission avec autant de zèle que d’efficacité.

CRIMES ET CHÂTIMENTS

Aux côtés de l’impitoyable Vevak, le ministère du renseignement et de la sécurité nationale qui a pris en 1979 la relève de la Savak (police secrète du chah), elle mène la chasse aux ennemis de la République islamique, où qu’ils se trouvent. Cette traque se focalise en priorité sur l’Organisation des moudjahidines du peuple d’Iran, principale force d’opposition intérieure, et sa vitrine politique, le Conseil national de la résistance iranienne. Ceux qui refusent de se soumettre aux oukases du régime sont froidement abattus. En Turquie, en Irak, au Pakistan, mais aussi en Europe. Dernier premier ministre de la monarchie, Chapour Bakhtiar sera ainsi poignardé puis égorgé à l’arme blanche à son domicile de Suresnes, dans la banlieue parisienne, un après-midi d’août 1991…

Dans le même temps, la mission de la force Al-Qods s’étoffe, avec l’appui complice mais discret des plus hautes autorités de l’Etat. Consolidation des liens socio-économiques avec la diaspora chiite, collecte du renseignement, déstabilisation de gouvernements considérés comme hostiles, formation et financement de mouvements islamiques révolutionnaires étrangers : la garde prétorienne du pouvoir s’active simultanément sur plusieurs fronts, grâce à un vaste réseau d’agents opérationnels recrutés parmi les soldats les plus émérites et les commandos d’élite.

De l’élimination ciblée de personnalités dissidentes à l’organisation et à la perpétration d’attentats coordonnés à l’étranger, la frontière est ténue. Et elle est facilement franchie. Le 18 juillet 1994 au matin, une explosion éventre le centre communautaire juif AMIA de Buenos Aires, la capitale argentine. L’attaque à la voiture piégée n’est pas sans rappeler celle survenue deux ans plus tôt, le 17 mars 1992, devant l’ambassade d’Israël (29 morts). Excepté que le bilan est beaucoup plus lourd : 85 personnes sont tuées ; plus de 200 autres, blessées. Dix-sept ans après les faits, l’enquête n’a toujours pas livré ses conclusions. Cependant, pour la justice argentine, le coupable a un nom, l’Iran, et un visage, celui d’Ahmad Vahidi, d’ailleurs visé par une notice rouge (avis de recherche en vue d’extradition) d’Interpol depuis novembre 2007, à la demande de Buenos Aires.

En dépit des dénégations vigoureuses de Téhéran, la piste iranienne paraît d’autant plus plausible qu’en 1991 Mohsen Rezaï, alors commandant en chef des pasdarans – il le restera jusqu’en 1997 –, avait lancé, dans un avertissement aussi prémonitoire que funeste : « Un jour, les étincelles de la colère et de la haine des musulmans brûleront à Washington, et ce sera aux Etats-Unis d’en assumer les conséquences (…). Un jour viendra où nulle part au monde les juifs ne trouveront d’endroit où se réfugier, à l’instar de Salman Rushdie [écrivain britannique dont le roman Les Versets sataniques, jugé blasphématoire à l’égard de l’islam, lui valut d’être condamné à mort par une fatwa de Khomeyni en 1989] ».

UNE LOYAUTÉ INFAILLIBLE

Si la force Al-Qods tient son rôle de sentinelle armée avec une rigueur jamais prise en défaut, exploitant, au gré des circonstances, les canaux et ressorts du terrorisme international, sa loyauté envers les caciques du régime ne s’arrête pas là. Puissant relais idéologique, elle défend aussi sans sourciller les causes « utiles » désignées comme telles par le pouvoir chiite. Par le passé, elle a, entre autres, soutenu l’Alliance du Nord de Massoud face aux Soviétiques « athées » en Afghanistan ou les Bosniaques (musulmans) contre les Serbes pendant la guerre de Bosnie-Herzégovine, de 1992 à 1995. Mais c’est au Proche-Orient, vaste pandémonium ouvert à tous les vents, que son interventionnisme est historiquement le plus prégnant.

Ainsi, le Liban a constitué, pendant longtemps, un théâtre d’opérations privilégié. Par l’entremise du Hezbollah, façonné à leur main à coups de conseils stratégiques, de livraisons clandestines d’armes et de généreux subsides, les dignitaires iraniens caressaient l’espoir d’installer à Beyrouth une théocratie sœur. Plus de trois mille combattants du « Parti de Dieu » auraient été formés à cette fin dans les camps d’entraînement de la plaine orientale de la Beqaa, ainsi que sur le sol iranien. Sous la tutelle resserrée de la force Al-Qods.

Aujourd’hui, dans la mesure où il est dominé par un gouvernement favorable au Hezbollah, le pays du Cèdre représente un intérêt moindre aux yeux de l’Iran, qui préfère, de loin, se focaliser sur l’Irak. En quelques années, la force Al-Qods est parvenue à noyauter tous les centres du pouvoir, n’hésitant pas, pour ce faire, à flatter la sensibilité chiite de ses interlocuteurs. Son influence touche également la Syrie de Bachar Al-Assad, proche allié stratégique, mais aussi les territoires palestiniens de la bande de Gaza et de la Cisjordanie, où elle s’applique à promouvoir les intérêts du Hamas et du Djihad islamique – dont l’aile armée, par effet miroir, porte le nom de « brigades Al-Qods » – aux dépens du Fatah de Mahmoud Abbas, jugé trop conciliant envers l’ennemi israélien.

Où s’arrête donc le périmètre d’action de la force Al-Qods ? Difficile de le dire, car ses ordres de mission sont à géométrie variable. Preuve en est, elle approvisionne aussi régulièrement en armes les talibans pro-iraniens qui luttent en Afghanistan contre les forces de la coalition internationale, et cela depuis au moins 2006. Plus de vingt ans après sa fondation, cette armée de l’ombre, dépendante du ministère de la défense, exhale toujours un parfum de mystère. A l’image de son chef, le général Qassem Suleimani, personnage madré décrit par ceux qui l’ont approché comme « un intrigant remarquablement doué ». Ses effectifs ? La fourchette la plus probable oscille entre 3000 et 5000 hommes. Son budget ? Les parlementaires iraniens eux-mêmes seraient bien en peine de le chiffrer. Et pour cause : il n’apparaîtrait même pas dans le budget national. Une culture du secret qui a aussi son avantage. A l’heure où l’Iran voit son étoile pâlir sur la scène régionale et où le pays, une fois de plus, est dans la ligne de mire de la communauté internationale en raison de son programme nucléaire, le régime compte plus que jamais sur la force Al-Qods pour jouer les garde-fous.

Aymeric Janier

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La herencia tóxica

Este documental trata de los efectos de los insecticidas sobre la salud y el medio ambiente, a través de la mirada de un agricultor biológico, Pere, y de Miquel Porta, director de un informe que mide los niveles de contaminantes en la población.


Herencia tóxica por valeriezoydo

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Quand RFI rencontre Rézo…

« Nous avons consulté votre journal « Rézo » (…) et nous vous demandons si vous accepteriez d’écrire un article de présentation de votre revue et son historique pour être inclus dans le sommaire du prochain numéro de notre revue », m’écrivaient récemment Vicky Sommet, Directrice déléguée à la Direction des Affaires Internationales de RFI, Chargée de la Francophonie et Erika Bernard, Assistante de John MAGUIRE, Directeur des Affaires Internationales. En effet, RFI édite tous les 3 mois un journal « Francophonie » adressé à quelques 1000 exemplaires aux institutionnels, diplomates, Alliances françaises, politiques en format papier et par e-mail aux journalistes. L’article est sorti, nous voulions vous le faire partager, ainsi que notre enthousiasme d’inspirer la confiance d’une institution comme RFI, véritable promoteur du dialogue interculturel. Merci à Vicky et à Erika!

Valérie Zoydo

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Rézo mag : le sens est ailleurs

Le dialogue Interculturel selon Rézo

Grâce à Internet, tous les médias, quels qu’ils soient, auraient aujourd’hui la possibilité de toucher un public international. Pourtant, cette opportunité technologique ne suffit pas à leur donner une dimension globale. Pour y parvenir, les médias doivent réfléchir à un moyen de s’adresser à des publics diversifiés, les relier à travers un dialogue interculturel, une des valeurs fondamentales de francophonie.

En créant Rézo mag en octobre 2010, nous nous sommes appuyés sur cette caractéristique essentielle. Nous ne voulions pas que la francophonie soit une fin en soi, mais un moyen pour explorer un langage universel : la quête de sens. Parallèlement à cela, la nécessité de dialoguer entre acteurs (experts de la société civile, journalistes, bloggers, philosophes, scientifiques, artistes, entrepreneurs sociaux, ONG…) nous est apparue comme un des enjeux des années à venir pour réfléchir autour de problématiques désormais planétaires et interconnectées qui ont des répercussions à l’échelle locale : la gestion de la crise énergétique, le réchauffement global , la lutte contre les dérives des marchés financiers, les abus de l’industrie agro-alimentaire, la perte de sens, la réflexion autour de l’équité sociale au niveau mondial, la définition de nouvelles valeurs comme par exemple, la culture « slow » ou la simplicité volontaire…

Pour ce faire, nous avons profité du fait que Rézo mag soit encore un média naissant, libre, indépendant pour se permettre quelques audaces au niveau éditorial, s’adresser à une cible urbaine, engagée, qui n’a pas encore conscience d’elle-même et qui n’a pas de frontières, à mi-chemin entre les créatifs culturels et les creative class : les nomades créatifs. Nous utilisons donc Rézo mag comme un laboratoire journalistique, toujours dans cette recherche de langage universel. En réalité celui-ci existe déjà à travers la philosophie, l’art contemporain, la danse, la musique, la photographie, la gastronomie, les nouvelles technologies, l’innovation, la citoyenneté, les échanges économiques, le lien social, l’environnement, les sciences, l’anthropologie… Autant de thématiques que nous avons choisies de traiter dans notre magazine, à condition qu’elles décryptent la société contemporaine et dessinent les contours du monde de demain.

Nous avons donc commencé notre aventure à l’échelle nationale, en Espagne en étant distribués à Barcelone et à Madrid. Puis à partir du numéro 4, nous avons commencé à abolir les frontières en nous introduisant dans les trains Elipsos reliant Barcelone à Madrid, Paris et Genève. L’actuelle réflexion autour de notre future plateforme web en partenariat avec l’école de commerce l’ESEC à Barcelone, nous a amenés à faire évoluer le projet vers une tour de Babel journalistique, en introduisant d’autres langues qui cohabiteront avec le Français. Le maître mot : l’Autre. Ainsi, Rézo mag se construit comme un voyage initiatique, un récit d’aventures, où chaque rencontre, chaque sujet a son importance. Le sens est partout à condition de savoir le chercher.
Valérie Zoydo

Mise en avant

Créer, c’est résister

Frida Khalo par Julien Levy,New York, 1938

Dans la vidéo qui suit, Gilles Deleuze, associe l’acte de création à une forme de résistance. « Un des motifs de l’art et de la pensée c’est une certaine honte d’être un homme », déclare le philosophe. « L’art consiste à libérer la vie que l’homme a emprisonnée ». « L’homme ne cesse d’emprisonner la vie, de tuer la vie ». « L’artiste c’est celui qui libère une vie, une vie puissante, une vie plus que personnelle. » C’est ça résister…

Et cette résistance , se pratique en réseaux, (en REZO?) « La fonction du réseau c’est de résister et de créer ». Merci cher Monsieur Deleuze de nous conforter dans nos actes créateurs, quels qu’ils soient : une entreprise, une oeuvre d’art, un article, un livre, un média, un projet … En créant Rézo fin 2010, nous nous sommes inscrits dans cette volonté de proposer des visions alternatives d’un monde qui change, avec toutes les difficultés et le risque que la liberté implique. Mais vos mots donnent du courage pour poursuivre cette aventure et pour stimuler la mise en réseaux de penseurs, experts de la société civile, artistes, visionnaires bref, tous ces résistants à la pensée unique, qui à leur manière veulent changer le monde.
VZ

Mise en avant

Que reste-t-il des utopies  ?

crédit : Andrés Arias Fuentes

Lorsque l’Occident découvre le “Nouveau Monde”, il entrevoit la possibilité d’y construire des cités idéales. Que reste-t-il de ces villages-hôpitaux construits dans la province de Michoacán, au Mexique au XVIe siècle et inspirés de l’utopie de Thomas More ?  Rézo vous emmène sur ces terres oubliées. Reportage.

Cinq cent ans se sont écoulés depuis la création de ces villages utopiques imaginés par les humanistes occidentaux… En revenant sur ces terres d’Amérique latine, jadis appelée le Nouveau Monde par l’Europe, le fossé parait grand avec la vision de l’actuel Occident. Quel est l’héritage légué par ces utopies de la renaissance, tant dans leurs organisations sociales, que dans leur architecture et leurs coutumes ? Quel apprentissage pouvons-nous en tirer ?

Angahuán, Cocucho, Tzintzuntzán… Au vu de la situation géographique de ces villages, très peu d’étrangers foulent ces terres situées dans une grande vallée volcanique (appelée meseta Purépecha). Ce qui permet aujourd´hui de pouvoir apprécier leur héritage. Leur isolement les a déconnectés de l’évolution de la société post-industrielle.

Les photos sont des regards simples qui, en se servant de la réalité immédiate composent une scène dotée d’une esthétique, mêlant des couleurs, des textures et des espaces que ces peuples sont capables de continuer de produire et de conserver. Les photos ont été prises durant les célébrations de l’Ascension de la Vierge : ce sont des temps de fête, de communion sociale, où les gens habillés pour l’occasion, sortent dans les rues pour l’un des jours les plus importants de leur calendrier.

Mais pour comprendre le fonctionnement de ce peuple, simple, sans histoires et qui semble vivre hors du temps, il est important d’en comprendre ses origines utopiques.

L’utopie de Thomas More en Amérique latine

C’est en 1516 que le mot utopie est créé par Thomas More avec la publication de son livre Utopia (du grec : lieu meilleur et/ou pas de lieu). Se servant des nouvelles possibilités techniques et des idées humanistes du début de la Renaissance, il décrit dans son livre la ville idéale tant du point de vue politique, social qu’au niveau de l’organisation du travail. Ces idées-là ne peuvent trouver leur application ni à Florence, ni dans les autres villes européennes.

Celles-ci ont déjà une structure politique et une forme urbaine établies depuis des siècles… Elles se concrétisent alors dans le fertile terrain de la nouvelle culture métisse qui se forme dans l’actuelle Amérique Latine. Là-bas, pratiquement toutes les villes nouvellement fondées ont un tracé urbain de la Renaissance (voir carte page 32). En revanche, peu d’entre elles appliqueront les idées politiques et sociales… En effet, les petits villages de cette série de photos font partie des rares villes utopiques restées intactes depuis cette période.

L’humanisme de l’espagnol Vasco de Quiroga

Si les idées de More ont pu prendre vie en Amérique Latine, c’est entre autres grâce à un personnage de l’élite humaniste espagnole du XVIe siècle, Vasco de Quiroga. Formé à l’université de Valladolid, juriste de la cour royale d´Espagne, à Oran, dans le nord de l’Afrique, il est envoyé par Charles Quint au Mexique pour entreprendre un voyage d’études et d’inspections dans le Michoacán. Il y découvre la façon inhumaine dont les populations indiennes sont traitées par les Conquistadors.

A titre d’exemple, un esclave indien vaut moins cher qu’un chien. A partir de 1531, il commence à préconiser à la juridiction chargée des colonies la protection des Indiens des abus, tortures et autres mises en esclavage en les réunissant dans des villages où leur vie serait réglée par le travail et un bon ordre politique inspiré par la philosophie de Thomas More. En 1535, il écrivit “Información en derecho”, une information juridique en faveur des indigènes.

Les premiers villages-hôpitaux

Nommé en 1538 1er évêque de la région, Vasco de Quiroga peut inscrire ses idées de nouvelle société dans la réalité. Il fonde avec ses propres fonds le premier village utopique, situé à Santa Fé (aujourd’hui il s’agit du principal district des bureaux de la ville de Mexico). Puis, le second près de la capitale du Michoacán (à l’ouest de Mexico) quelques années plus tard. Ces villages hôpitaux, ainsi appelés, sont structurés autour d’une Chapelle-hôpital appelée Guatápera.

En plus de leurs fonctions respectives, les Chapelles-hôpitaux sont des endroits d’accueil pour les orphelins, les centres d’éducation et le pouvoir. “Ce ne seront pas les grandes agglomérations qu’il avait d’abord proposées, mais la base reste le groupe restreint de familles et l’administration repose sur un système familial et électif. D’autre part, la communauté des biens, la journée de travail de six heures, la distribution des fruits du travail commun selon le besoin de chacun, le refus du luxe et l’abandon des professions inutiles constitueront les vraies règles de la vie de ces villages hôpitaux”, écrit Christian Rudel, dans son ouvrage Le Mexique.

D’hier à aujourd’hui : le maintien du lien social

Encore aujourd’hui, beaucoup de ces chapelles sont utilisées pour des offices religieux mais également pour la population comme des lieux de réunion sociale. Quant à la variété de métiers que les différents peuples de la communauté Purépecha ont appris, elle est aussi restée intacte.

Dans un contexte de mondialisation, d’uniformisation d’une culture de masse, la préservation de ces acquis et de cette identité culturelle Purépecha donne matière à réfléchir sur l’importance du lien social, des rituels et de l’organisation sociale du travail au sein d’une communauté. D’ailleurs, la tendance aujourd’hui est au retour à la communauté, à l’esprit de village et à la culture de proximité, en témoigne l’émergence des “villes en transition”, autosuffisantes et écologiques, à l’image de la ville de Totnes, en Angleterre. Et si les villes-utopies restent par définition des cas isolés, ou difficiles à mettre en place, préservons-les, car elles donnent de l’espoir : sans l’horizon d’un idéal, les combats sociaux n’ont pas d’âme.

ANDRÉS ARIAS FUENTES AVEC VALÉRIE ZOYDO

Le XXIème siècle sera-t-il spirituel?

Clairvoyance, médiumnité, guérisseurs, guides, méditation, karma, aura, astrologie, apocalypse et nouveau monde… L’esotérisme, la spiritualité, le mystère et l’invisible font leur grand retour dans les pratiques, les besoins et le vocabulaire des individus. Même certains psychiatres et médecins allopathes reconnaissent conseiller à leur patients de se rendre chez un magnétiseur ou un guérisseur. D’autres encore, ont recours à des médecines alternatives et à des croyances où l’on évoque sans tabous, l’existence d’un guide ou un ange gardien, les couleurs de l’aura, les énergies ect. Comment décrypter ce phénomène dans un monde occidental caractérisé par le cartésianisme et la laïcité? Est-ce le signe d’une évolution de notre conscience et de notre rapport au monde et à l’univers ? Avons-nous désormais besoin de spiritualité sans l’intermédiation de la religion ? Ce besoin de transcendance marque-t-il un rejet de notre monde actuel? Est-ce un retour vers une sorte de polythéisme où chacun se forge sa propre religion et se crée ses propres Dieux ( ex: les « Dieux du stade ») ? Développons-nous notre intelligence émotionnelle à travers nos pratiques spirituelles et notre vie intérieure ? Où s’arrête la spiritualité laïque et où commence une certaine dérive sectaire ?

Cette acceptation d’un mystère se montre de plus en plus frappante, notamment à la lecture du magazine Inexploré, de l’INREES, qui propose, ni plus, ni moins de découvrir l’extraordinaire . Le dernier numéro évoquait la mort, et les expériences de mort imminente. Et vous ? En quoi croyez vous?

Pour aller plus loin:
http://www.meditationfrance.com/dossiers/mondial4.htm
« L’homme dieu ou le sens de la vie », Luc Ferry

Valérie Zoydo